La vie d'Augustin Fresnel et son œuvre scientifique sont parfaitement connues grâce à ses contemporains : François Arago, son ami et collaborateur, qui rédigea son éloge devant l'Académie de Sciences le 26 juillet 1830, dont le texte a été repris dans le troisième tome des œuvres complètes, son frère Léonor Fresnel qui participa à la publication des travaux d'Augustin, Émile Verdet qui fut l'un des maîtres d'œuvre de cette publication et qui en écrivit l'introduction. Signalons que lors du centenaire de la mort d'Augustin Fresnel, Charles Fabry (c'est le texte de cette conférence que R.Massain donne dans Physique et Physiciens, publié par Magnard (1966), dans la lecture XXXVIII, dédiée à « Fresnel et l'optique ») donna dans une remarquable conférence, une biographie de Fresnel dans laquelle, avec le recul du temps, il essaie de porter un « jugement sur Fresnel et son œuvre ».

« Un siècle s'est écoulé depuis la mort de Fresnel ; le recul est assez grand pour qu'on puisse se demander ce que le temps a fait de son œuvre. Peut-on dire que cette œuvre est restée immuable, que nous envisageons la théorie de la lumière sous l'aspect même où il l'avait laissée ? Assurément non. Et d'ailleurs, serait-ce faire un grand éloge d'une oeuvre scientifique que de dire qu'il a été impossible d'y rien ajouter ? La science n'est jamais finie, et dire d'une découverte qu'il a été impossible d'y rien ajouter, ne serait-ce pas dire qu'elle a conduit à une impasse ? Tel n'a pas été le cas de l'œuvre de Fresnel. Les lois qu'il a découvertes, les grandes notions introduites par lui sont restées à la base de la science ; mais les idées ont continué à évoluer. Nous ne croyons plus à l'existence réelle d'un éther élastique, construit à l'image des milieux matériels, tout en étant chargé d'expliquer les actions réciproques des corps, se laissant traverser sans résistance tout en ayant des propriétés analogues à celles de l'acier ou peut-être du caoutchouc, voire même de la poix de cordonnier, suivant une comparaison humoristique de Lord Kelvin. Fresnel, d'ailleurs, avait sagement laissé dans l'ombre les propriétés de ce milieu, mais ses successeurs, moins prudents, essayèrent de préciser ces propriétés et n'y réussirent pas. Et cependant, les notions fondamentales introduites par Fresnel sont restées et ont permis d'aller plus loin. »

La naissance d'Augustin-Jean Fresnel le 10 mai 1788 à Broglie (Eure) est due au fait que son père, architecte, avait été engagé dès 1784 afin de diriger les travaux de rénovation du château de Broglie : il y rencontra Augustine Mérimée(l'oncle maternel d'Augustin n'est autre que le père de ProsperMérimée) qu'il épousa l'année suivante. Ils eurent quatre fils : Louis, Augustin, Léonor et Fulgence. Léonor suivra particulièrement les travaux d'Augustin et lui succédera à la commission des phares et balises en 1827.

Augustin Fresnel entra à l'École Polytechnique, puis à sa sortie à celle des Ponts et Chaussées. Titulaire du diplôme d'ingénieur, il fut envoyé construire des routes en Vendée, puis en 1812 dans la Drôme à Nyons. Le retour de Napoléon de l'île d'Elbe, lui parut « une attaque contre la civilisation (Arago, tome 1 des œuvres complètes d'Arago, page 116, dans sa notice biographique sur Fresnel) » et malgré une santé fragile, il s'en fut rejoindre l'armée royale du midi. « Fresnel rentra à Nyons, sa résidence habituelle presque mourant... Peu de jours après, un commissaire impérial vint prononcer sa destitution et le placer sous la surveillance de la haute police.[...] Fresnel obtint la permission de passer par Paris ; il y séjourna sans jamais être inquiété.(Arago, ibid. page 117) ».

Charles Fabry note dans Physique et physiciens, page 292, que :

« Ce court séjour à Paris fut pour Fresnel le véritable début de sa carrière scientifique ; il put lire quelques mémoires et se mettre en relations avec quelques-uns des hommes du milieu scientifique de Paris, en particulier avec Arago, qui devint son protecteur, son collaborateur et son ami.
« Arago devina tout de suite le génie de Fresnel, l'aida à se documenter, parfois collabora directement avec lui, le défendit, dans toutes les occasions, enfin s'employa de son mieux pour que son métier d'ingénieur, son gagne-pain, loin d'entraver sa carrière scientifique, pût se combiner avec elle. »

C'est à partir de 1815 que Fresnel commence ses premières recherches expérimentales sur la lumière : elles porteront sur la diffraction de la lumière, dont le mémoire fut couronné par l'Académie de Sciences en 1819, sur les interférences lumineuses, sur la polarisation de la lumière et la nature des vibrations lumineuses. La dernière partie de sa brève vie fut consacrée à l'amélioration des phares, par la mise au point, en particulier, des lentilles à échelons.

Arago dans le tome 1 de ses œuvres complètes, page 181, raconte la fin poignante de Fresnel :
Celui-ci entouré de sa mère et de son frère Léonor, s'était retiré à Ville d'Avray.
« Fresnel habitait déjà la campagne la Société royale de Londres me chargea de lui la médaille de Rumford. Ses forces, alors presque épuisées, lui permirent à peine de jeter un coup d'oeil sur ce signe, si rarement accordé, de l'estime de l'illustre Société. Toutes ses pensées s'étaient tournées vers sa fin prochaine, tout l'y ramenait :
- Je vous remercie, me dit-il d'une voix éteinte, d'avoir accepté cette mission ; je devine combien elle a dû vous coûter, car vous avez ressenti, n'est-ce pas, que la plus belle couronne est peu de chose, quand il faut la déposer sur la tombe d'un ami ?
Hélas ces douloureux pressentiments ne tardèrent pas à s'accomplir. Huit jours encore s'étaient à peine écoulés, et la patrie perdait l'un de ses plus vertueux citoyens, l'Académie l'un de ses membres les plus illustres, le monde savant un homme de génie. »