Figure 1 : cristal de spath d'Islande.
Le spath d'Islande est un cristal rhomboédrique, dont les six faces sont des parallélogrammes (dans la figure 1, ce sont des losanges), dont les angles obtus valent 101o53'. Lorsqu'on le place sur un texte [photo 2(a)], on voit que l'image se dédouble. Si on fait tourner le cristal de [photo 2(b)] à [photo 2(c)], on constate que l'image qui se superpose à la ligne tracée sur la feuille reste immobile, c'est l'image ordinaire, tandis que l'autre, appelée l'image extraordinaire, tourne et disparaît lorsque le trait tracé sur la feuille est orienté suivant la bissectrice des angles obtus de la base du cristal. Le plan A'BCD', normal à la base et à la face supérieure, dans lequel l'image ordinaire et l'image extraordinaire se superposent au trait original [photo 2(c)], est le plan de section principale.
Figure 2 : spath d'Islande : biréfringence.
Figure 3 : spath d'Islande : biréfringence.
Considérons un rayon lumineux incident normal à la face ABA'B' et son trajet dédoublé en rayon ordinaire et rayon extraordinaire dans le plan de la section principale A'BCD' (figure : 4).
Figure 4 : rayons ordinaire et extraordinaire.
Mettant en pratique ses propres conclusions sur les critères d'obtention de phénomènes d'interférences :
« [...] il est nécessaire,
  1. que les rayons qui interférent soient partis d'une source commune ;
  2. qu'ils ne diffèrent dans leur marche que d'un nombre d'ondulations assez limité, même lorsqu'on emploie la lumière la plus simplifiée.
  3. qu'ils ne se croisent pas sous un angle trop grand, parce que les franges deviendraient si étroites qu'elles échapperaient à la plus forte loupe ;
  4. que, tant que ces rayons ne sont pas parallèles et forment entre eux un angle sensible, l'objet éclairant ait de très petites dimensions, et qu'il soit d'autant plus fin que cet angle est considérable.
»
Fresnel essaie de créer des interférences avec le rayon ordinaire et le rayon extraordinaire avec une expérience analogue à celle de la figure 5, qui est donnée par Rosmorduc, page 106.
Figure 5 : « Les deux faisceaux superposés par l'intermédiaire d'une lentille convergente sur un écran, ne donnent pas de franges d'interférences » : Rosmorduc, Les révolutions de l'optique et l'œuvre de Fresnel, page 106.
C'est en essayant, en vain, de créer des interférences avec le rayon ordinaire et le rayon extraordinaire obtenus avec un cristal de spath d'Islande, que Fresnel s'interroge sur la nature de la vibration lumineuse.
Figure 6 : les vibrations sont perpendiculaires : leur somme géométrique ne peut être nulle.

Par analogie avec le son, Fresnel pense tout d'abord, que la lumière est une vibration longitudinale qui se propage, mais l'échec de son expérience d'interférences avec les deux rayons obtenus par le cristal de spath, va l'amener (après de longues réflexions et la contribution décisive d'Ampère) à conclure sur la nature transversale de la vibration lumineuse.

Les conclusions des expériences précédentes permettent à Fresnel de considérer qu'une lumière monochromatique est une vibration sinusoïdale transversale (perpendiculaire au rayon lumineux) qui se propage. Pour Fresnel cette vibration concernait les molécules de l'éther, un milieu aux propriétés particulières et dont l'existence n'a jamais pu être prouvé. Aujourd'hui avec Maxwell, la lumière est considérée comme une onde électromagnétique, c'est-à-dire comme la propagation simultanée des vibrations d'un champ magnétique et d'un champ électrique dont les vecteurs représentatifs (, ), orthogonaux entre eux, sont situés dans un plan perpendiculaire au rayon lumineux. Comme l'œil est sensible uniquement au champ électrique  , le vecteur de Fresnel n'est autre que . Dans le schéma suivant nous ne représenterons que .

Figure 7 : Polarisation des rayons ordinaire et extraordinaire. La lumière naturelle n'est pas polarisée : a une direction variant aléatoirement, tout en restant dans le plan d'onde, c'est-à-dire perpendiculaire au rayon. On suppose que la lumière incidente est monochromatique, après traversée du spath, les deux rayons sont polarisés : les deux vibrations sont perpendiculaires. Le rayon extraordinaire est en rouge, le rayon ordinaire en bleu. Ces couleurs n'ont d'autre but que de bien distinguer les deux rayons. Si la lumière incidente est rouge, les deux rayons transmis par le cristal de spath seront rouges.