Fresnel mourut à 39 ans, laissant une œuvre ayant révolutionné la conception de l'optique, en imposant le caractère ondulatoire de la lumière. La théorie corpusculaire était-elle définitivement enterrée ?

La théorie ondulatoire de la lumière de Fresnel nécessitait l'existence d'un support matériel pour la propagation des ondes lumineuses. Ce support hypothétique fut nommé éther en espérant qu'un jour on pourrait en déterminer la nature(Sur ce sujet, on peut lire l'article des Annales de la Fondation Louis de Broglie, Volume 29 numéro 1-2, 2004 Colloque de Peyresq 2002 : http://www.ensmp.fr/aflb/AFLB-291/table291.htm et plus précisément http://www.ensmp.fr/aflb/AFLB-291/aflb291p021.pdf).

Les expériences sur la célérité de la lumière réalisées par Michelson entre 1881 et 1887 ne permirent pas de mettre en évidence cet éther.

En 1905 Einstein interprète l'effet photo-électrique avec sa théorie des quanta : la lumière est constituée de grains d'énergie (les photons) appelés quanta. La lumière possède alors un double caractère : ondulatoire et corpusculaire. Certaines expériences s'interprètent en s'appuyant sur la nature ondulatoire de la lumière et d'autres sur sa nature corpusculaire. Difficile à concevoir...pourtant si on peut se risquer à des comparaisons, en regardant les dessins suivants suivant un angle d'observation ou un état d'esprit différent, nous ne verrons pas la même chose : voir le remarquable site de Cyberic Wollbrett dont la figure suivante, s'inspire.

Figure 1 : cylindre et ses projections : regardé sous deux angles différents, un cylindre nous apparaît tantôt comme un cercle, tantôt comme un rectangle. Pourtant il n'est ni l'un ni l'autre.

Richard Feynman1 , dans son livre Lumière et matière, page 41, résume, à sa façon personnelle, ce dilemme :

« Suivit une période où l'intelligence des physiciens fut mise à rude épreuve : la lumière disait-on, doit-être considérée soit comme une onde, soit comme une particule...selon les conditions expérimentales. C'est ce qu'on a appelé la « dualité onde-corpuscule ». On a pu dire, de façon plaisante, qu'à cette époque la lumière était une onde les lundis, mercredis et vendredis, et un ensemble de particules les mardis, jeudis et samedis. Restait le dimanche pour réfléchir à la question.  »

C'est à partir de 1919 qu'intervient Louis de Broglie dont le château familial à Broglie avait été restauré par le père d'Augustin Fresnel et où, par ce concours de circonstances, naquit Augustin en 1788 !

Louis de Broglie va faire la synthèse des ondes et des corpuscules et étendre la dualité ondes-corpuscules aux particules matérielles : une expérience célèbre de diffraction avec des électrons confirmera sa thèse2. Georges Lochak dans le livre 12 clés pour le physique, présente ainsi (page 55), les idées de Louis de Broglie :

« Pour de Broglie [...], il existe dans la nature, objectivement, en dehors de notre observation, un objet qui est à la fois onde et particule. Pour de Broglie, il existe une onde et dans cette onde il existe à tout instant et en dehors de toute expérience de mesure, une petite région singulière, de très grande intensité, où l'énergie se trouve en majorité (sinon en totalité) accumulée, et c'est cette région singulière qui, pour lui, joue le rôle de particule. Autrement dit, de Broglie imagine un objet profondément dualistique, qui est localisé et qui pourtant, grâce à l'onde qui le guide, est capable de connaître les obstacles autour de lui ; en particulier dans un phénomène de diffraction, les particules sont guidées par les ondes et s'orientent vers les franges brillantes que nous connaissons [...]   »

En conclusion de ce paragraphe, je citerai encore Georges Lochak3 :

« [...] quand nous recensons toutes les raisons que nous avons de croire aux ondes(et elles sont innombrables !) nous avons l'impression d'apercevoir comme une petite facette de la nature des choses. Il ne paraît pas possible que la lumière ne soit pas ondulatoire du tout. Il y a quelque chose de vrai dans cette image. Mais quand nous accumulons les arguments que nous avons pour que la lumière soit corpusculaire, ils sont moins nombreux, il faut l'avouer, mais ils nous apparaissent très puissants : je crois profondément que nous apercevons alors une autre facette de la réalité, [...] jusqu'à présent les deux facettes ne se raccordent pas : nous n'avons encore jamais obtenu de modèle tout à fait acceptable du dualisme onde/particule.   »