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bouasse2_1.tex

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% Mluque5130@aol.com
% 26 juin 2002
% persistance des impressions lumineuses
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\newcounter{boua}
\newcommand{\itemBoua}{\addtocounter{boua}{1}\strut\indent\textit{\theboua}\textsuperscript{o} ---
}
\title{PERSISTANCE DES IMPRESSIONS LUMINEUSES}
\author{Henri Bouasse (1926)}
\date{}
\begin{document}
\maketitle
\pagecolor{Beige}
\section{Courbes tournantes\protect\footnote{Les illustrations, sous forme d'animations seront sur la page web.}}
\itemBoua Deux lignes \textit{brillantes}, $\mathrm{L_1}$ et
$\mathrm{L_2}$ droites ou courbes, tournent rapidement dans des
plans parallèles voisins ; leurs vitesses angulaires sont entre
elles dans un rapport simple. L'\oe{}il placé devant le système
distingue, dans l'espèce de gaze que semble produire le mouvement
des lignes, l'image immobile d'une troisième courbe I \textit{plus
sombre} que le fond sur lequel elle se dessine. Cette courbe~I est
le lieu des points d'intersection apparents des lignes en
mouvement.
 
\dotfill
\\
\itemBoua À chaque instant, pour tous les points d'intersection
apparente, l'\oe{}il ne reçoit de lumière que de la ligne devant,
puisqu'elle est opaque et intercepte la lumière envoyée par la
ligne d'arrière. Les points d'intersection apparaissent donc en
sombre. \textit{La continuité du lieu de ces points (courbe
d'intersection) est due à la persistance des impressions
lumineuses}.
\setcounter{boua}{0}
\section{Anorthoscope}
\itemBoua Choisissons pour une des lignes mobiles une fente
rectiligne percée dans un cercle noir. Donnons-nous la courbe
d'intersection~I.
\begin{figure}[h]
\input{Fig164.tex}
\caption{\label{fig164} Anorthoscope}
\end{figure}
Cherchons quelle doit être alors l'autre courbe mobile, pour un
rapport donné des vitesses, par exemple pour des vitesses égales et
de sens inverses.
 
[\dotfill
 C'est un nouveau genre d'anamorphoses
\dotfill]
\\
\itemBoua \textsc{Vitesses de sens inverses}.
 
Fixons les idées par un exemple simple~(fig.\ref{fig164}).
 
La courbe I qu'on doit voir, est un cercle ABC\ldots la fente
tourne dans le sens des aiguilles d'une montre avec une vitesse
constante ; le dessin A$bc$\ldots tourne en sens inverse avec le
même vitesse.
 
Cherchons quel doit être ce dessin.
 
Dans la position initiale, au temps origine, la fente est en OA.
Les points du dessin sont donc A et E.
 
Quand la fente vient en OB, il faut que l'une de ses intersections
avec le dessin soit le point B. Mais le dessin a tourné du même
angle~AOB en sens inverse. Donc à l'origine des temps, le point
qui apparaît en B quand la fente est en OB, devait être en $b$ tel
que, le rayon restant le même, l'angle AO$b$ soit double de~AOB.
Et ainsi de suite.
 
\dotfill
 
D'une manière générale, soit V la vitesse angulaire de la fente,
soit $v$ celle du dessin déformé qui est par hypothèse de sens
contraire.
 
Pour passer de la courbe à obtenir au dessin déformé, il faut
dilater les angles dans le rapport de:
$$\mathrm{R}=\frac{\mathrm{V}+v}{\mathrm{V}}=1+\frac{v}{\mathrm{V}}$$
 
Il faut que le quotient $\displaystyle\frac{v}{\mathrm{V}}$ soit
un nombre entier pour que la figure soit immobile.
 
Le lecteur vérifiera aisément qu'à raison de la persistance des
sensations lumineuses, on aperçoit simultanément~R figures
identiques, symétriquement distribuées autour du centre.
 
Si l'on veut que les dessins réguliers soient complètement
séparés, il faut qu'ils occupent un angle inférieur à $2\PI:R$.
 
\dotfill
\setcounter{boua}{0}
\section{Roue tournant derrière une palissade
\protect\footnote{Ici aussi les illustrations, sous forme d'animations seront sur la page web.}}
\itemBoua Le problème des courbes tournantes admet comme cas
particulier la translation de l'une des courbes : c'est le
problème classique de la \textit{roue passant derrière une
palissade}.
\begin{figure}[h]
\input{Fig165.tex}
\caption{\label{fig165} Roue tournant derrière une palissade}
\end{figure}
\textit{Les rayons paraissent courbes} ; la figure~(\ref{fig165bis}) montre ce qu'ils
deviennent.
 
Comme instinctivement l'\oe{}il fixe le centre de la roue, que par
suite il ne s'agit que de mouvements relatifs, nous ramenons
immédiatement le problème à cet autre : \textit{Une droite
lumineuse L tourne d'un mouvement uniforme autour du point fixe C
: déterminer le lieu de son intersection P avec la fente F qui se
déplace parallèlement à elle-même avec une vitesse
constante~(\ref{fig165}).}
 
Les équations du lieu cherché sont (avec les signes spécifiés sur
la figure~\ref{fig165}).
$$\THETA=\THETA_0+2\PI\frac{t}{\mathrm{T}},\quad
x=-a\frac{t}{\mathrm{T}}$$
$$y=x\tan\THETA,\quad y=x\tan\left(\THETA_0-\frac{2\PI
x}{a}\right)$$
Le faisceau de courbes, représenté par la
figure~(\ref{fig165bis}), admet pour paramètre variable
l'angle~$\THETA_0$ ; il correspond donc à des rayons différents de
la roue.
 
L'angle~$\THETA_0$ détermine l'azimut de ces rayons quand $x=0$,
c'est-à-dire quand la fente mobile coïncide avec le centre du
cercle.
 
Le faisceau de courbes reste le même si on remplace $x$ par
$x+ka:2$, où $k$ est un nombre entier quelconque ; l'argument de
la tangente change alors d'un nombre quelconque de fois $\PI$.
\begin{figure}[h]
\input{Fig165bis.tex}
\caption{\label{fig165bis} faisceau de courbes}
\end{figure}
 
\itemBoua La courbure apparente des rayons dépend du rapport des
vitesses de translation et de rotation, rapport mesuré par $a$
longueur dont se déplace la fente pendant que la droite fait un
tour. Dans le cas de la roue roulant sur le sol, $a=2\PI R$ ; R
est le rayon de la jante. D'où résulte que la courbure apparente
des rayons ne dépend pas de la vitesse de la roue.
 
[\ldots]
 
\begin{center}
\textbf{\Large Moirés}
\end{center}
\setcounter{boua}{0}
\section{Première espèce de moiré
\protect\footnote{Les illustrations, sous forme d'un package et d'animations seront sur la page web.}}
\itemBoua Considérons un faisceau de courbes :
$$f(x,y)=s,$$
où $s$ est le paramètre dont la valeur caractérise la courbe
considérée : le nombre des courbes du faisceau est infini.
 
Parmi toutes ces courbes, distinguons en deux faisceaux F et
$\Phi$, formés de courbes distinctes les unes des autres :
$$s=f(t),\quad s=\PHI(\TAU)$$
\textit{Nous posons que t et $\TAU$ sont des nombres entiers.}
 
Traçons ces deux faisceaux sur du papier transparent ; à travers
le papier, regardons un fond uniformément éclairé. Nous créons
ainsi un phénomène périodique, présentant ce qu'on peut appeler de
\textit{franges d'interférence}. Au voisinage de certaines valeurs
$s_1$, $s_2$, $s_3$, du paramètre $s$, les courbes sont plus
\textit{resserrées ; en raison de leur épaisseur}, elles se
superposent plus ou moins : la lumière transmise est donc plus
\textit{grande}. Au voisinage des valeurs intermédiaires du
paramètre $s$, les courbes sont plus \textit{uniformément réparties}
; elles ne se recouvrent pas : le lumière transmise est \textit{plus
petite}.
\\
\itemBoua Le phénomène précédent se produit, par exemple, quand on
regarde normalement, deux grilles planes identiques, à barreaux
parallèles, situées dans des plans parallèles (comme deux
garde-fous de pont).
\begin{figure}[h]
\input{Fig167.tex}
\caption{\label{fig167} grilles à barreaux parallèles}
\end{figure}
Les deux grilles se projettent sur un même plan comme deux
faisceaux de droites épaisses, parallèles, équidistantes, mais
dont l'équidistance n'est pas la même en raison de l'inégalité des
distances des grills à l'observateur. Nous avons le faisceau de
courbes :
\begin{equation}
x=s
\label{grilles}
\end{equation}
avec les conditions :
$$s=\ALPHA t,\quad s=\BETA\TAU$$
$\ALPHA$ et $\BETA$ sont des nombres peu différents ; les
paramètres $t$ et $\TAU$ sont la suite des nombres entiers.
 
La figure~\ref{fig167} représente la superposition de deux
faisceaux de droites pour $\ALPHA=1,0$ et $\BETA=1,1$.
 
On supposera aux traits une épaisseur plus grande ; on ne l'a pas
donné pour rendre la figure plus intelligible.
 
Multiplions les nombres $\ALPHA$ et $\BETA$ par la puissance de
$10^n$ de 10 la plus petite qui les rend entiers. Il est clair que
la période est $t=10^n\BETA$, intervalles du premier faisceau, et
de $\TAU=10^n\ALPHA$ intervalles du second.
 
Dans le cas de la figure, la période est de 11~intervalles du
premier faisceau et de 10 du second.
\\
\itemBoua Le lecteur construira aisément une figure avec des
cercles concentriques.
 
Dans l'étude des interférences (anneaux de Newton), nous
trouverons réalisé le cas : $\RHO=s$,
\\
avec les conditions : \hfill$s=\ALPHA\sqrt{t}$, \hfill$s=\BETA\sqrt{\TAU}$ ;\hfill\strut
 
$\RHO$ est le rayon des cercles ; les paramètres $t$ et $\TAU$
sont la suite des nombres entiers.
\section{Seconde espèce de moirés}
\textit{Je ne reproduis pas ce paragraphe, qui traite ce sujet d'une
façon générale. Le \S{} suivant est l'illustration d'un cas
particulier de moiré de seconde espèce.}
\setcounter{boua}{0}
\section{Systèmes de droites respectivement parallèles}
%\begin{bouasse}
\itemBoua Considérons les deux faisceaux de droites respectivement
parallèles :
\begin{equation}
x\cos\THETA +y\sin\THETA=bt+ct^2\quad x\cos\THETA -y\sin\THETA=b\TAU-c\TAU^2
\label{droites}
\end{equation}
\begin{figure}[h]
\input{Fig169.tex}
\caption{\label{fig169} Moiré : droites parallèles}
\end{figure}
\indent Pour $t=\TAU=0$, nous avons les deux droites $\mathrm{OS_2}$ et
$\mathrm{OS_1}$; elles font évidemment le même angle $\THETA$ avec
l'axe $\mathrm{O}y$.
 
Les courbes lieu des points d'intersection, qui correspondent aux
petites diagonales des parallélogrammes, satisfont à la condition
:
$$t-\TAU=\MU=\mathrm{constante}$$
\indent Additionnons et retranchons les équations~(\ref{fig169}) :
$$
\begin{array}{rcl}
2x\cos\THETA&=&(b+c\MU)(t+\TAU)\\
2y\sin\THETA&=&b\MU+c(t^2+\TAU^2)=b\MU+c(\MU^2+2t\TAU)
\end{array}
$$
\indent Pour parfaire l'élimination, on s'appuyera sur la relation:
$$(t+\TAU)^2-4t\TAU=\MU^2$$
\begin{equation}
\textrm{D'où :}\qquad
\frac{4x^2\cos^2\THETA}{(b+c\MU)^2}-\frac{4y\sin\THETA}{c}+\frac{2b\MU}{c}+\MU^2=0
\label{parabole}
\end{equation}
\indent Les courbes cherchées sont donc des paraboles qui ont O$y$ pour
axe commun.
 
Leurs sommets sont aux points :
\begin{equation}
y=\frac{\MU(2b+c\MU)}{4\sin\THETA}
\label{sommets}
\end{equation}
\itemBoua En pratique le paramètre $c$ étant très petit devant $b$,
les équations se simplifient.
 
L'équation~(\ref{parabole}) devient
:
$$
\frac{4x^2\cos^2\THETA}{b^2}-4y\sin\THETA+2b\MU=0
$$
\indent C'est la même parabole pour toutes les valeurs de $\MU$ glissant
parallèlement O$y$. Les sommets sont aux points:
\begin{equation}
y=\MU b\,:\,2\sin\THETA
\label{sommets2}
\end{equation}
Le rayon de courbure au sommet de la parabole est :
$$\mathrm{R}=\frac{b^2}{2c}\frac{\sin\THETA}{\cos^2\THETA}$$
\indent Si les droites parallèles sont équidistantes $(c=0)$, les
paraboles sont des droites~(\ref{sommets2}) ; autrement dit, leur
rayon de courbure au sommet devient infini.
\\
\itemBoua Pour faire l'expérience on trace à l'encre de Chine sur une
feuille de papier 51~traits parallèles, longs de 20~cm (par
exemple), et dont la distance les uns par rapport aux autres croît
(de 2~mm pour les eux premiers, à 3~mm pour les deux derniers)
suivant la formule :
$$s=2t+0.01t^2$$
\indent On photographie en réduisant à la moitié ou au quart. On fait deux
diapositifs\footnote{orthographe de l'époque.}. On réalise le
phénomène après retournement de l'un d'eux.
\section{L'humour d'Henri Bouasse}
Dans la préface de son livre  \textit{Cordes et membranes} (1926),
Henri Bouasse
disserte longuement, sur le mémoire de Réaumur \textit{sur le thermomètre}
(1730), qu'il donne en exemple d'\oe{}uvre scientifique
remarquable. Puis il entrouvre la porte pour une récréation, que je vous laisse goûter :
 
\dotfill
 
Récemment je reçus la lettre suivante, que je crois devoir communiquer au public,
bien que mon amour-propre n'ait pas lieu d'en être satisfait.
 
\begin{flushright}
Paris, le 21 janvier 1926.
\end{flushright}
 
\indent\indent « Monsieur,\\[1em]
 
 Il y a quelques semaines, sous un faux nom, je vous fis une visite
pour contenter la turlutaine d'un ami sédentaire qui désire savoir si
les gens ont le nez camus ou en trompette. Vous me reçûtes bien ;
mais je fus choqué de vous trouver en bras de chemise, sans faux
col, une cigarette à la bouche. Un tel débraillé me blessa, car je
suis droguiste et notable commerçant.
 
Je vous trouvai au milieu de livres dont je comptai 14 grand ouverts,
ce qui n'ajouta pas à mon admiration, ayant pour habitude de n'en lire qu'un à la fois (quand j'en lis).
 
 Devant, vous s'étalait un vieil in-quarto (mon ami est libraire,
1 7, rue Lénine) que vous considériez avec amour. Ne sachant que
dire, je m'enquis de ce qu'il contenait.
 
 Ce fut comme, si j'avais ouvert la bonde d'un tonneau plein. Il
 s'agissait de Réaumur et des thermomètres, sujet fort convenable
 parce que, droguiste, je le possède dans ses grandes lignes. Monsieur,
 vous fûtes long, mais parvîntes à m'intéresser ; quand je vous quittai,
 j'avais presque oublié votre manque de tenue.
 
Eh bien ! Monsieur, ma première impression était la bonne : vous n'êtes qu'un fumiste ou un abruti.
 
Avant-hier je me trouvais dans la boutique de mon ami. Sur le comptoir j'avisai un magnifique volume
que j'ouvris machinalement. Quelle ne fut pas ma stupeur de lire, à propos de Réaumur,
la page que voici !
 
« C'est à Réaumur qu'est due la première unification des degrés thermométriques dans un travail
publié en 1730 où les méthodes qu'il employait sont minutieusement décrites.
Il renonce (et cela n'était pas un progrès) aux deux points fixes d'Amontons,
pour ne conserver que le point de fusion de la glace où il place le \textit{zéro} ;
la graduation est déterminée par cette condition que pour chaque degré,
le liquide (de l'esprit-de-vin) se dilate de la millième partie de son volume initial.
Le thermomètre de Réaumur devint rapidement d'un usage presque universel : chose curieuse,
tandis qu'il a disparu depuis longtemps en France, il s'est maintenu dans les pays de langue
allemande par choix du point d'ébullition de l'eau (80\textsuperscript{o}) qui conserve l'échelle de Réaumur. »
 
 
 Je n'eu pas un instant de doute sur la valeur de ce texte. Le
volume en question, imprimé sur beau papier et fort cher, est le tome XIV de
l'\textit{ Histoire de la Nation française} ; le signataire est ancien élève de l'École polytechnique,
 professeur à la Sorbonne, membre de l'Institut, de cet Institut que vous avez l'inconvenance d'appeler
 le Dépôt National des Pets-de-Loup, alors qu'il est le Panthéon de nos Gloires.
 
Je conclus. Vous êtes un mauvais plaisant (je crois bien avoir remarqué votre \oe{}il goguenard) ;
plus vraisemblablement vous êtes  gâteux. Dans ce cas Monsieur, achetez une petite voiture,
installez-vous dedans qu'on vous promène au soleil, dodelinant de la tête et faisant ga, ga, ga, ga !
 
Vous n'avez aucun titre, aucune décoration ; vous n'appartenez à aucune société savante,
vous n'avez même aucune relation avec l'Institut National de Recherches Scientifiques ou
celui de Coopération Internationale Intellectuelle (si utiles : ils donnent la matérielle à deux de mes
neveux, trop bêtes pour que je les garde dans mes magasins). Vous n'êtes pas riche. Et vous avez la prétention ridicule
d'exister par vous-même, d'avoir des idées personnelles surtout, y compris le mémoire de Réaumur.
 
Rentrez en vous-même. Vous êtes un vieux petit fonctionnaire à 900~dollars,  ce que refuserait mon caissier,
 ce que je donne à mes commis qui se décorent du titre d'ingénieur quand ils distinguent la margarine de la cassonade,
 ou la vanille de la cannelle !
 
Je signe d'un nom emprunté : la critique sincère, par conséquent utile, doit être anonyme ; le patient
reçoit les coups sans pouvoir en tirer vengeance, et le critique accomplit sans danger sa tâche noble et salutaire.
 
\begin{flushright}
« POTDECOLLE, Droguiste. »
\end{flushright}
 
\end{document}