%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \chapter{Dérivation des fonctions vectorielles} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \minitoc \newpage %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% Le but de ce chapitre est de définir la dérivation des fonctions vectorielles, de définir aussi les fonctions de classe $\mcal{C}^k$ et de classe $\mcal{C}^k$ par morceaux, sans oublier de consolider nos connaissances sur la dérivation des fonctions complexes. Nous utiliserons les notations suivantes : $\K$ désigne le corps $\R$ ou $\C$; $E$ est un $\K$-espace vectoriel de dimension finie; $I$ est un intervalle de $\R$ non réduit à un point; les fonctions étudiées sont définies sur $I$ et à valeurs dans $E$, \ie{} des éléments de $\FIE$; si $I$ est un intervalle d'extrémités $a$ et $b$, l'intérieur de $I$ désigne l'intervalle ouvert $\into ab$. %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \section{Dérivée, fonction dérivée} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Dérivée en un point} %--------------------------------------------------------------------- \begin{Df}[Vecteur dérivée] La fonction $\vc f\in\FIE$ est dérivable en un point $a\in I$ si, et seulement si, l'application qui à $t\in I\setminus\{a\}$ associe $(t-a)^{-1}\bigl( \vc f(t)-\vc f(a) \bigr)$ admet une limite dans~$E$. Dans ce cas, cette limite est appelée \emph{vecteur dérivée} ou plus simplement \emph{dérivée} de $\vc f$ en $a$; on la note $\vc f'(a)$, $\D\vc f(a)$, $\dps\ra{d\vc f}{dt}(a)$ ou encore $\dps\ra d{dt}\bigl( \vc f(t) \bigr)\rvert_{t=a}$. % \Reponse{$\dsp\vc f'(a)=\D\vc f(a)=\ra{d\vc f}{dt}(a) =\ra d{dt}\bigl( \vc f(t) \bigr)\Bigr\rvert_{t=a} = \lim_{\substack{t\to a \\ t\in I\setminus\{a\}}}\ra1{t-a}\Bigl( \vc f(t)-\vc f(a) \Bigr)$} \end{Df} On peut utiliser le changement de variable : $t=a+h$ et : \Reponse{ $\dsp \vc f'(a)= \lim_{\substack{h\to 0 \\ h\neq 0}}\ra1h\bigl( \vc f(a+h)-\vc f(a) \bigr) $} \begin{NB}[Interprétation géométrique] Dans le cas réel et si $a$ est un point intérieur à $I$, la droite paramétrée par $$ \lambda\in\R\mapsto \bigl( a,\vc f(a) \bigr)+\bigl( \lambda,\lambda\vc f'(a) \bigr) $$ est la \emph{tangente } en $\bigl( a,\vc f(a) \bigr)$ au graphe de $\vc f$ dans $I\times E$. \end{NB} \begin{NB}[Interprétation cinématique] Toujours dans le cas réel et maintenant pour un espace $E$ de dimension 3, $\vc f(t)$ s'interprète comme la position à l'instant $t$ d'un point mobile $M(t)$ défini par : $\overrightarrow{OM(t)}=\vc f(t)$, et le vecteur $\vc f'(a)$ comme le \emph{vecteur vitesse} de ce mobile à l'instant $t=a$. \end{NB} %-------------------------------------------------- \subsection{Dérivée et développement limité d'ordre un} %-------------------------------------------------- La dérivabilité de $\vc f$ en $a$ se caractérise par l'existence d'une fonction $\beps$ de limite nulle en $a$, définie par $$ \beps : t\mapsto\ra1{t-a}\bigl( \vc f(t)-\vc f(a) \bigr)-\vc f'(a) \text{ si $t\neq a$} $$ et on peut écrire : $$ \vc f(t)= \vc f(a) +(t-a)\vc f'(a)+(t-a)\beps(t) $$ ce qui montre : \begin{Prop} $\vc f$ est dérivable en $a$ si, et seulement si, $\vc f$ possède un développement limité à l'ordre 1 au voisinage de $a$. \end{Prop} \begin{Cor} Toute fonction dérivable en $a$ est continue en $a$; la réciproque est fausse. \end{Cor} % \begin{proof} L'existence d'un développement limité montre la continuité et $t\mapsto|t|$ est une fonction continue (sur $\R$) qui n'est pas dérivable en $t=0$. \end{proof} %---------------------------------------------------------------------- %-------------------------------------------------- \subsection{Dérivées à droite, à gauche} %-------------------------------------------------- \begin{Dfs}[Dérivée à droite, dérivée à gauche]\alaligne La fonction $\vc f\in\FIE$ est \emph{dérivable à droite} (resp. \emph{à gauche}) en un point $a\in I$ si $I_a^+=I\cap\intfo a{+\infty}$ (resp. $I_a^-=I\cap\intof {-\infty}a$) n'est pas réduit à un point et si la restriction de $\vc f$ à $I_a^+$ (resp. $I_a^-$) admet une dérivée en $a$. Dans ce cas, une telle dérivée s'appelle \emph{dérivée à droite} (resp. \emph{dérivée à gauche}) de $\vc f$ en $a$; elle est notée $\vc f'_d(a)$ (resp. $\vc f'_g(a)$). \Reponse{ $\dsp \vc f'_d(a)= \lim_{\substack{t\to a \\ t>a}}\ra1{t-a}\Bigl( \vc f(t)-\vc f(a) \Bigr)= \lim_{\substack{h\to 0 \\ h>0}}\ra1h\Bigl( \vc f(a+h)-\vc f(a) \Bigr) $} \Reponse{ $\dsp \vc f'_g(a)= \lim_{\substack{t\to a \\ t<a}}\ra1{t-a}\Bigl( \vc f(t)-\vc f(a) \Bigr)= \lim_{\substack{h\to 0 \\ h<0}}\ra1h\Bigl( \vc f(a+h)-\vc f(a) \Bigr) $} \end{Dfs} \begin{NB} Le symbole $\lim_{\substack{t\to a \\ t>a}}$ (resp. $\lim_{\substack{t\to a \\ t<a}}$) peut encore se noter $\lim_{t\downarrow a}$ (resp. $\lim_{t\uparrow a}$). \end{NB} %-------------------------------------------------- \subsection{Fonction dérivée} %-------------------------------------------------- \begin{Df}[Fonction dérivée]\alaligne Une fonction $f\in\FIE$ est dérivable sur $I$ si, et seulement si, elle est dérivable en tout point de $I$. On définit alors l'application dérivée de $\vc f$ notée $\vc f'$ ou $\D \vc f$ par : $$ \vc f' : t\in I\mapsto \vc f'(t) $$ L'ensemble des fonctions dérivables sur $I$ à valeurs dans $E$ est notée $\DIE$; $\DIE[I,\K]$ est encore noté $\DIE[I]$. \end{Df} \begin{Df}[Fonctions de classe $\mathcal{C}^1$]\alaligne Toute fonction $\vc f$ dérivable sur $I$ dont la dérivée $\vc f'$ est continue sur $I$ est dite \emph{de classe} $\mcal{C}^{1}$ sur $I$. L'ensemble des fonctions de classe $\mcal{C}^{1}$ sur $I$ à valeurs dans $E$ est noté $\CkIE{1}$; $\CkIE[I,\K]{1}$ se note aussi $\CkIE[I]{1}$. \end{Df} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \section{Opérations} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% %-------------------------------------------------- \subsection{Linéarité de la dérivation} %-------------------------------------------------- Comme pour les applications numériques, la dérivation est linéaire; plus précisément : \begin{Th}[Linéarité de la dérivation]\alaligne $\DIE$ et $\CkIE{1}$ sont des espaces vectoriels et l'application $\D$ de $\DIE$ (resp. $\CkIE{1}$) vers $\FIE$ (resp. $\CIE$) qui à $\vc f$ associe $\vc f'$ est linéaire. \end{Th} \begin{proof} Soient $a\in I$, $(\vc f,\vc g)\in\big(\DIE\big)^2$ et $(\lambda,\mu)\in\K^2$; pour $t\in I\setminus\{a\}$, on~a : \begin{align*} \ra1{t-a}\Bigl( (\lambda\vc f+\mu\vc g)(t)-(\lambda\vc f+\mu\vc g)(a) \Bigr) &= \lambda\ra1{t-a}\bigl( \vc f(t)-\vc f(a) \bigr) + \mu\ra1{t-a}\bigl( \vc g(t)-\vc g(a) \bigr) \\ &\tend[t\to a,\ t\in I\setminus\{a\}] \lambda\vc f'(a)+\mu\vc g'(a) \end{align*} Ceci montre que $(\lambda\vc f+\mu\vc g)'(a)=\lambda\vc f'(a)+\mu\vc g'(a)$, implique la linéarité de $\D$ puisque le raisonnement est valable pour tout $a\in I$, et donne la stabilité de $\DIE$ par combinaison linéaire. Si $\vc f'$ et $\vc g'$ sont continues, $(\lambda\vc f+\mu\vc g)' = \lambda\vc f'+\mu\vc g'$ est continue et $\CkIE{1}$ est un sous-espace vectoriel de $\CIE$. \end{proof} %-------------------------------------------------- %-------------------------------------------------- \subsection{Composantes d'une dérivée} %-------------------------------------------------- On munit l'espace vectoriel $E$ de dimension finie $p\geq 1$ d'une base $\mathcal{B}=(\vc e_1,\vc e_2,\dots,\vc e_p)$; toute application $\vc f\in\FIE$ s'écrit : $$ \qqs t\in I,\ \vc f(t)=\sum_{j=1}^p f_j(t)\vc e_j $$ Rappelons-nous que les composantes du vecteur vitesse sont les dérivées des composantes du mouvement (dans un repère galiléen), ce qui nous motive pour~le : \begin{Th}[Composantes d'une dérivée]\alaligne $\vc f$ est dérivable sur $I$ (resp. de classe $\mcal{C}^1$) si, et seulement si, ses composantes $f_j$ relatives à une base de $E$ sont dérivables sur $I$ (resp. de classe $\mcal{C}^1$) et dans ce cas : $$ \qqs t\in I,\ \vc f'(t)=\sum_{j=1}^p f'_j(t)\vc e_j $$ \end{Th} % \begin{proof} C'est une conséquence du théorème sur les composantes d'une limite. Soient $a\in I$ et $t\in I\setminus\{a\}$, le taux d'accroissement $$ \ra1{t-a}\Bigl( \vc f(t)-\vc f(a) \Bigr)= \sum_{j=1}^p \ra{f_j(t)-f_j(a)}{t-a}\vc e_j $$ admet une limite en $a$ si, et seulement si, ses composantes admettent des limites en $a$. $\vc f'=\sum_{j=1}^p f'_j\vc e_j$ est continue si, et seulement si, les composantes $f'_j$ le sont. \end{proof} %---------------------------------------------------------------------- \begin{Cor}[Cas des fonctions complexes]\mbox{} Soit $f$ une fonction numérique complexe sur $I$; les propositions suivantes sont équivalentes : \begin{prop} \item $f$ est dérivable (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $I$; \item $\RE(f)$ et $\IM(f)$ sont dérivables (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $I$; \item $\conjug{f}$ est dérivable (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $I$. \end{prop} Dans ce cas, $\D f= \D(\RE f)+\ii\D(\IM f)$ et $\D(\conjug{f})=\conjug{\D f}$. \end{Cor} \begin{proof} $f=\RE(f) +\ii\IM(f)$ et $\conjug{f}=\RE(f)-\ii\IM(f)$ donnent les composantes de $f$ et $\conjug{f}$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Cor}[Dérivée de l'inverse d'une fonction]\alaligne Soit $f\in\DIE$ (resp. $\CkIE[I]{1}$); si $f$ ne s'annule pas, $\ra1f\in\DIE$ (resp. $\CkIE[I]{1}$) et : $$ \Bigl( \ra1f \Bigr)'=-\ra {f'}{f^2} $$ \end{Cor} % \begin{proof} Le résultat est connu pour les fonctions à valeurs réelles. Si $f$ est une fonction à valeurs complexes, on pose $f=a+\ii b$; alors $$ \ra1f=\ra{a-\ii b}{a^2+b^2} =\ra{a}{a^2+b^2}+\ii\ra{-b}{a^2+b^2} $$ ce qui montre la dérivabilité et : \begin{align*} \Bigl( \ra1f \Bigr)' &= \ra{a'(a^2+b^2)-a(2aa'+2bb')}{(a^2+b^2)^2} +\ii\ra{-b'(a^2+b^2)+b(2aa'+2bb')}{(a^2+b^2)^2}=\cdots \\ &= -\ra{a'+\ii b'}{(a+\ii b)^2}=-\ra{f'}{f^2} \end{align*} Si $f$ est de classe $\mcal{C}^1$, $(1/f)'=-f'f^{-2}$ est continue. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Cor}[Cas des matrices]\alaligne Soit $M$ une application de $I$ dans $\MnpK$ qui à $t$ associe la matrice $M(t)=\bigl(a_{i,j}(t)\bigr)_{i,j}$; les propositions suivantes sont équivalentes : \begin{prop} \item $M$ est dérivable (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $I$; \item pour tout $i\in\Intf1n$ et tout $j\in\Intf1p$, les $a_{i,j}$ sont des fonctions dérivables (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur~$I$. \end{prop} Dans ce cas, pour tout $t\in I$, $M'(t)$ est la matrice $\bigl(a'_{i,j}(t) \bigr)_{i,j}$. \end{Cor} % \begin{proof}\mbox{}\\ Les fonctions $a_{i,j}$ sont les composantes de $M$ dans la base canonique de $\MnpK$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Cor}[Caractérisation des fonctions constantes sur un intervalle]\alaligne Soient $I$ un \textbf{intervalle} et $\vc f$ une fonction à valeurs dans E, continue sur $I$ et dérivable sur l'intérieur de~$I$; alors $\vc f$ est constante sur $I$ si, et seulement si, $\vc f'$ est nulle sur l'intérieur de $I$. \end{Cor} % \begin{proof} La propriété est vraie pour les fonctions numériques réelles : c'est une conséquence du théorème des accroissements finis (voir le cours de première année). Puisqu'une fonction est constante si, et seulement si, ses composantes sont constantes, la propriété est vraie pour les fonctions à valeurs dans un $\R$-espace vectoriel de dimension finie, donc aussi pour les fonctions à valeurs complexes et, plus généralement, pour les fonctions à valeurs dans un $\C$-espace vectoriel de dimension finie. \end{proof} %-------------------------------------------------- %-------------------------------------------------- \subsection{Composition avec une application numérique} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Dérivée d'une fonction composée]\alaligne Soient $\vc f\in\DIE$ (resp. $\CkIE{1}$) et $\vphi\in\mathcal{D}(J)$ (resp. $\CkIE{1}$) tels que $\vphi(J)\subset I$; alors $\vc f\circ\vphi$ est dérivable (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $J$ et : $$ (\vc f\circ\vphi)'= \vphi'(\vc f'\circ\vphi) $$ \end{Th} % \begin{proof} Le théorème est vraie pour les fonctions à valeurs réelles; il est vrai pour les composantes $f_j\circ\vphi$ de $\vc f\circ\vphi=\sum_{j=1}^p (f_j\circ\vphi)\vc e_j$. Ce théorème est donc vrai pour $\vc f$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Cor}[Dérivée d'une fonction paire, impaire]\alaligne La dérivée d'une fonction paire est une fonction impaire; la dérivée d'une fonction impaire est une fonction paire. \end{Cor} \begin{proof} Soit $\vc f\in\DIE$. Si $\vc f$ est paire, alors $\vc f(t)=\vc f(-t)$ pour tout $t\in I$ et par dérivation : \begin{equation} \qqs t\in I,\ \vc 0=\ra d{dt}\bigl(\vc f(t)-\vc f(-t)\bigr)= \vc f'(t)+\vc f'(-t) \end{equation} ce qui montre l'imparité de $\vc f'$. La démonstration est identique pour les fonctions impaires. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Cor}[Dérivée d'une fonction périodique]\alaligne La dérivée d'une fonction périodique est périodique de même période. \end{Cor} \begin{proof} Soit $\vc f\in\DIE[\R,E]$ une fonction $T$-périodique; alors $\vc f(t+T)=\vc f(t)$ pour tout $t\in \R$ et, par dérivation, on obtient : $$ \qqs t\in \R,\ \vc 0=\ra d{dt}\bigl(\vc f(t+T)-\vc f(t)\bigr)= \vc f'(t+T)-\vc f'(t) $$ ce qui montre que $\vc f'$ est périodique de période $T$. \end{proof} %-------------------------------------------------- %-------------------------------------------------- \subsection{Composition avec une application linéaire} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Composition avec une application linéaire]\alaligne Soient $\vc f\in\DIE$ (resp. $\CkIE[I]{1}$) et $\vc u\in\Lin EF$ une application linéaire entre deux espaces vectoriels de dimension finie; alors $\vc u\circ\vc f$ est dérivable (resp. de classe $\mcal{C}^1$) et : $$ (\vc u\circ\vc f)'=\vc u\circ\vc f' $$ \end{Th} % \begin{proof} Puisque $\vc u$ est une application linéaire entre espaces vectoriels de dimension finie, $\vc u$ est continue (et même lipschitzienne). Pour $a\in I$ et $t\in I\setminus\{a\}$, on a : \begin{equation} \ra1{t-a}\Bigl( \vc u\bigl( \vc f(t) \bigr)-\vc u\bigl( \vc f(a) \bigr) \Bigr)= \vc u\Bigl( \ra1{t-a}\bigl( \vc f(t)-\vc f(a) \bigr) \Bigr) \tend[\substack{t\to a \\ t\in I\setminus\{a\}}]\vc u\bigl(\vc f'(a)\bigr) \end{equation} car $\vc f$ est dérivable en $a$ et $\vc u$ continue. Si $\vc f$ est de classe $\mcal{C}^1$, $(\vc u\circ\vc f)'= \vc u\circ\vc f'$ est continue. \end{proof} %-------------------------------------------------- %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Composition avec une application bilinéaire} %--------------------------------------------------------------------- Calculer la dérivée d'un produit, d'un produit scalaire, d'un produit vectoriel : toutes ces opérations sont des cas particuliers d'un résultat général : \begin{Th}[Composition avec une application bilinéaire]\alaligne Soient $E_1$, $E_2$ et $F$ trois $\K$-espaces vectoriels de dimension finie, $B$ une application bilinéaire de $E_1\times E_2$ dans $F$, $\vc f\in\mathcal{D}(I,E_1)$ (resp. $\CkIE[I,E_1]{1}$) et $\vc g\in\mathcal{D}(I,E_2)$ (resp. $\CkIE[I,E_2]{1}$); alors l'application $ \vc h : t\in I\mapsto B\bigl( \vc f(t),\vc g(t) \bigr)$ est dérivable (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $I$ et : $$ \vc h'(t)=\ra d{dt}\Bigl( B\bigl( \vc f(t),\vc g(t) \bigr) \Bigr)= B\bigl( \vc f'(t),\vc g(t) \bigr)+B\bigl( \vc f(t),\vc g'(t) \bigr) $$ \end{Th} \begin{proof} Les espaces vectoriels $E_1$, $E_2$ et $F$ étant de dimension finie, l'application bilinéaire $B$ est continue. Soit $a\in I$; la bilinéarité de $B$ donne l'égalité : $$ \vc h(t)-\vc h(a)=B\bigl(\vc f(t)- \vc f(a),\vc g(a)\bigr)+ B\bigl(\vc f(t),\vc g(t)-\vc g(a)\bigr) $$ et, pour $t\in I\setminus\{a\}$, le taux d'accroissement de $\vc h$ s'écrit : \begin{equation} \ra{\vc h(t)-\vc h(a)}{t-a}= B\biggl( \ra{\vc f(t)-\vc f(a)}{t-a},\vc g(a) \biggr)+ B\biggl( \vc f(t),\ra{\vc g(t)-\vc g(a)}{t-a} \biggr) \end{equation} Puisque $\vc f$ est dérivable en $a$, donc continue en $a$, et $B$ continue, on obtient en passant à la limite sur $t$ : \begin{gather} B\biggl( \ra{\vc f(t)-\vc f(a)}{t-a},\vc g(a) \biggr) \tend[t\to a]B\bigl( \vc f'(a), \vc g(a) \bigr) \\ B\biggl( \vc f(t),\ra{\vc g(t)-\vc g(a)}{t-a} \biggr) \tend[t\to a]B\bigl( \vc f(a), \vc g'(a) \bigr) \end{gather} ce qui donne la formule annoncée. Si $\vc f$ et $\vc g$ sont de classe $\mcal{C}^1$, la continuité de $\vc f$, $\vc g$, $\vc f'$, $\vc g'$ et $B$ assure la continuité de $\vc h'$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Cor}[Produit de $n$ fonctions numériques]\alaligne Si les fonctions à valeurs complexes $f_1$, $f_2$,\dots, $f_n$ sont dérivables (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $I$, leur produit $\prod_{k=1}^n f_k$ est dérivable (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $I$ et : $$ \D\biggl( \prod_{k=1}^n f_k \biggr)= \sum_{k=1}^n\biggl(\D(f_k)\prod_{\substack{j=1 \\ j\neq k}}^n f_j\biggr) $$ \end{Cor} \begin{proof} Le théorème précédent donne la relation pour $n=2$ et une récurrence (à écrire) donne le résultat. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Cor}[Quotient de deux fonctions numériques]\alaligne Soient $f$ et $g$ deux applications numériques dérivables (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $I$; si $g$ \emph{ne s'annule pas} sur $I$, la fonction $f/g$ est dérivable (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $I$ et : $$ \D\Bigl( \ra fg \Bigr)=\ra{\D(f)g-f\D(g)}{g^2} $$ \end{Cor} \begin{proof} Il suffit de remarquer que $f/g=f(1/g)$, ce qui est parfois une excellente méthode de dérivation, et d'appliquer la dérivation d'un produit et d'un inverse. Si $f$ et $g$ sont de classe $\mcal{C}^1$, $(f'g-fg')g^{-2}$ est continue. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Cor}[Produit d'une fonction vectorielle et d'une fonction scalaire]\alaligne Soient $\vphi\in\DIE$ (resp. $\CkIE[I]{1}$) et $\vc f\in\DIE$ (resp. $\CkIE{1}$); alors $\vphi\,\vc f$ est dérivable (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $I$ et : $$ \D(\vphi\,\vc f)=(\D\vphi)\vc f+\vphi(\D\vc f) $$ \end{Cor} \begin{proof} Utilisation de la bilinéarité de $(\lambda,\vc v)\in\K\times E\mapsto \lambda\vc v\in E$.\\ % Si $\vphi$ et $\vc f$ sont de classe $\mcal{C}^1$, $\D(\vphi\,\vc f)= (\D\vphi)\vc f+\vphi\D(\vc f)$ est continue. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Cor}[Produit scalaire]\alaligne Soient $\vc f$ et $\vc g$ deux fonctions dérivables (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $I$ à valeurs dans un espace euclidien $E$; alors $\Scal fg$ est dérivable (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $I$ et : $$ \ra d{dt}\scal{\vc f(t)}{\vc g(t)}=\scal{\vc f'(t)}{\vc g(t)}+ \scal{\vc f(t)}{\vc g'(t)} $$ \end{Cor} %-------------------------------------------------- \begin{Cor}[Orthogonalité de $\vc e$ et $\vc e'$ si $\vc e$ est unitaire]\alaligne Soit $\vc e$ une fonction dérivable sur $I$ à valeurs dans un espace euclidien $E$; si pour tout $t\in I$, $\vc e(t)$ est unitaire, $\vc e(t)$ et $\vc e'(t)$ sont orthogonaux. \end{Cor} \begin{proof} Pour tout $t\in I$, $1=\normd{\vc e(t)}^2=\scal{\vc e(t)}{\vc e(t)}$; par dérivation, on obtient : \begin{equation} 0=\ra d{dt}\scal{\vc e(t)}{\vc e(t)}= \scal{\vc e'(t)}{\vc e(t)}+\scal{\vc e(t)}{\vc e'(t)}= 2\scal{\vc e'(t)}{\vc e(t)} \end{equation} ce qui montre l'orthogonalité de $\vc e'(t)$ avec $\vc e(t)$ pour tout $t\in I$. L'interprétation mécanique est évidente : le support de la trajectoire de $\vc e(t)$ est le cercle de centre $\vc 0$ et de rayon 1; le vecteur vitesse est tangent à la trajectoire dont orthogonal au rayon vecteur. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Cor}[Produit vectoriel]\alaligne Soient $\vc f$ et $\vc g$ deux fonctions dérivables (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $I$ à valeurs dans un espace euclidien orienté $E$ de dimension trois; alors $\vc f\wedge\vc g$ est dérivable (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $I$ et : $$ \ra d{dt}\Bigl( \vc f(t)\wedge\vc g(t) \Bigr)= \vc f'(t)\wedge\vc g(t)+\vc f(t)\wedge\vc g'(t) $$ \end{Cor} %-------------------------------------------------- \begin{Cor}[Produit matriciel]\alaligne Soient $A$ et $B$ deux applications dérivables (resp. de classe $\mcal{C}^1$)de $I$ à valeurs respectivement dans $\MnpK$ et $\mathcal{M}_{p,q}(\K)$ alors $AB$ est dérivable (resp. de classe $\mcal{C}^1$) sur $I$ et : $$ (AB)'=A'B+AB' $$ \end{Cor} \begin{NB} Attention! Dans les deux derniers exemples, la multiplication n'est pas commutative; il faut donc ne pas changer l'ordre des facteurs. \end{NB} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \section{Dérivées d'ordre supérieur} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% Cette section permet d'envisager les dérivées d'ordre $k>1$ et d'étudier les différentes opérations algébriques qui s'y rapportent. %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Généralités} %--------------------------------------------------------------------- \begin{Df}[Dérivée d'ordre $k$]\alaligne Soient $k\in\N^*$ et $\vc f\in\FIE$; les dérivées successives de $\vc f$ sont définies par récurrence; on pose $\vc f^{(0)}=\vc f$ et $\vc f$ est $k$ \emph{fois dérivable} si, et seulement si, $\vc f^{(k-1)}$ est dérivable. La dérivée $k$\ieme ou dérivée d'ordre $k$ de $\vc f$ est notée aussi $\D^k(\vc f)$. L'ensemble des fonctions $k$ fois dérivables sur $I$ à valeurs dans $E$ se note $\DkIE{k}$; $\DkIE[I,\K]{k}$ est encore noté $\DkIE[I]{k}$. \end{Df} On a donc les relations : $$ \vc f^{(j)}=(\vc f')^{(j-1)}=\Bigl(\vc f^{(j-1)}\Bigr)'= \Bigl(\vc f^{(j-k)}\Bigr)^{(k)} $$ \begin{Df}[Fonctions de classe $\mcal{C}^k$]\alaligne Une fonction $k$ fois dérivable est dite de classe $\mcal{C}^k$ sur $I$ si, et seulement si, sa dérivée d'ordre $k$ est continue sur $I$. Une fonction est dite de classe $\mcal{C}^\infty$ si, et seulement si, elle est de classe $\mcal{C}^k$ pour tout $k\in\N$ ou, ce qui est équivalent, si, et seulement si, elle est $k$ fois dérivable pour tout $k\in\N$. L'ensemble des fonctions de classe $\mcal{C}^k$ sur $I$ à valeurs dans $E$ est noté $\CkIE{k}$; $\CkIE[I,\K]{k}$ est encore noté $\CkIE[I]{k}$. \end{Df} %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Exemples} %--------------------------------------------------------------------- Soit $a\in\C$; \Reponse{$\dsp \qqs t\in\R\setminus\{a\},\ \ra{d^k}{dt^k}\biggl( \ra1{t-a}\biggr)=\ra{(-1)^k k!}{(t-a)^{k+1}} \quad\et\quad \ra{d^k}{dt^k}\biggl( \ra1{a-t}\biggr)=\ra{k!}{(a-t)^{k+1}} $} \Reponse{ $\dsp\qqs n\in\N,\ \qqs t\in\R,\ \ra{d^k}{dt^k}\Bigl\{(t-a)^n\Bigr\}= \begin{cases} \quad\dsp\ra{n!}{(n-k)!}(t-a)^{n-k} & \text{ si $k<n$} \\ \quad\dsp n! & \text{ si $k=n$} \\ \quad\dsp 0 & \text{ si $k>n$} \end{cases} $} \Reponse{$\dsp \qqs t\in\R,\ \D^k(\cos)(t)=\cos\Bigl(t+k\ra\pi2\Bigr),\ \D^k(\sin)(t)=\sin\Bigl(t+k\ra\pi2\Bigr) $} \Reponse{$\D^k(\exp)=\exp$} \Reponse{$ \D^{2k}(\ch)=\ch,\ \D^{2k+1}(\ch)=\sh,\ \D^{2k}(\sh)=\sh,\ \D^{2k+1}(\sh)=\ch $} La dérivée d'ordre $k$ d'une fraction rationnelle se calcule en la décomposant en éléments simples sur $\C$, puis en déterminant la dérivée d'ordre $k$ de chaque éléments simples. %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Opérations} %--------------------------------------------------------------------- %-------------------------------------------------- \subsubsection{Linéarité de la dérivée d'ordre $k$} %-------------------------------------------------- \begin{Th} Pour tout $k\in\N\cup\{\infty\}$, $\DkIE{k}$ et $\CkIE{k}$ sont des $\K$-espaces vectoriels et pour tout $j\in\Intf0k$ : $$ \D^j(\lambda\vc f+\mu\vc g)=\lambda\D^j(\vc f)+\mu\D^j(\vc g) $$ \end{Th} \begin{proof} Démonstration par récurrence sur $j$ en utilisant :\\ $ \D^{j+1}(\lambda\vc f+\mu\vc g)= \bigl(\D^j(\lambda\vc f+\mu\vc g)\bigr)' = \bigl( \lambda\D^j(\vc f)+\mu\D^j(\vc g) \bigr)' =\lambda\D^{j+1}(\vc f)+\mu\D^{j+1}(\vc g) $ \end{proof} \enlargethispage{\baselineskip} %-------------------------------------------------- \subsubsection{Dérivée d'ordre $k$ d'un produit} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Formule de Leibniz]\alaligne Le produit $\vphi\,\vc f$ de deux fonctions $\mcal{C}^k$ est une fonction de classe $\mcal{C}^k$ et : $$ (\vphi\,\vc f)^{(k)}=\sum_{j=0}^k\comb kj \vphi^{(j)}\vc f^{(k-j)} =\sum_{j=0}^k\comb kj \vphi^{(k-j)}\vc f^{(j)} $$ \end{Th} \begin{proof} Démonstration par récurrence sur $k$.\\ % La propriété a été démontrée pour $k=1$. On la suppose vraie au rang $k$; il nous faut la démontrer au rang $k+1$. \begin{equation*} \begin{split} (\vphi\vc f)^{(k+1)} & = \bigl((\vphi\vc f)^{(k)}\bigr)'= \Bigl( \sum_{j=0}^k\comb kj \vphi^{(j)}\vc f^{(k-j)} \Bigr)' \\ & = \sum_{j=0}^k\comb kj \Bigl( \vphi^{(j)}\vc f^{(k-j)} \Bigr)' \text{ \hspace{34.3mm}(linéarité de la dérivation)} \\ & = \sum_{j=0}^k\comb kj \Bigl(\vphi^{(j+1)}\vc f^{(k-j)}+ \vphi^{(j)}\vc f^{(k-j+1)}\Bigr) \text{ \hspace{15mm}(dérivée d'un produit)} \\ & = \sum_{r=1}^{k+1}\comb k{r-1}\vphi^{(r)}\vc f^{(k-r+1)}+ \sum_{j=0}^k\comb kj \vphi^{(j)}\vc f^{(k-j+1)} \text{ \hspace{2em}(en posant $r=j+1$)} \\ & = \comb k0\vphi^{(0)}\vc f^{(k+1)}+ \sum_{r=1}^k \Bigl(\comb k{r-1}+\comb kr\Bigr)\vphi^{(r)}\vc f^{(k+1-r)}+ \comb kk\vphi^{(k+1)}\vc f^{(0)} \\ & = \sum_{r=0}^{j+1}\comb{k+1}r \vphi^{(r)}\vc f^{(k+1-r)} \end{split} \end{equation*} % car $\comb k0=\comb kk=1=\comb{k+1}0=\comb{k+1}{k+1}$ et l'algorithme fondamental du triangle de Pascal donne : $$ \qqs r\in\Intf 1k,\ \comb k{r-1}+\comb kr=\comb{k+1}r $$ On remarque que la dérivée d'ordre $j$ de $\vphi\,\vc f$ est continue sur $I$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Cor} $\CkIE[I]{k}$ est une $\K$-algèbre. \end{Cor} \begin{proof} La multiplication est stable sur $\CkIE[I]{k}$, la fonction constante $1$ est de classe $\mcal{C}^\infty$; $\CkIE[I]{k}$ est donc une sous-algèbre de $\CIE[I]$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \subsubsection{Inverse} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Inverse d'une fonction $\mcal{C}^k$]\alaligne L'inverse $1/f$ d'une fonction numérique de classe $\mcal{C}^k$ qui ne s'annule pas sur $I$, est de classe $\mcal{C}^k$. \end{Th} \begin{proof} Démonstration par récurrence sur $k$.\\ % La propriété a déjà été démontrée pour $k=1$. On la suppose vraie au rang $k$. Si $f$ est de classe $\mcal{C}^{k+1}$ sur $I$, la dérivée $(1/f)'=-f'/f^2=f'\times(1/f)\times(1/f)$ est de classe $\mcal{C}^k$ comme produit de trois fonctions $\mcal{C}^k$, et donc $1/f$ est de classe $\mcal{C}^{k+1}$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Cor}[Quotient de fonctions $\mcal{C}^k$]\mbox{} Si $f$ et $g$ sont deux fonctions numériques de classe $\mcal{C}^k$ et si $g$ ne s'annule pas sur $I$, $f/g$ est de classe~$\mcal{C}^k$. \end{Cor} %-------------------------------------------------- \subsubsection{Composition} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Composition de fonctions $\mcal{C}^k$]\mbox{} La composée $\vc f\circ\vphi$ d'une application $\vc f$ de classe $\mcal{C}^k$ sur $I$ et d'une fonction $\vphi$ de classe $\mcal{C}^k$ sur un intervalle $J$ à valeurs dans $I$ est de classe $\mcal{C}^k$ sur $J$. \end{Th} \begin{proof} Démonstration par récurrence sur $k$.\\ La propriété a déjà été démontrée pour $k=1$. On la suppose vraie au rang $k$. Si $\vc f$ et $\vphi$ sont de classe $\mcal{C}^{k+1}$, la dérivée $(\vc f\circ\vphi)'=\vphi'(\vc f'\circ\vphi)$ est de classe $\mcal{C}^k$ comme produit et composée de deux fonctions de classe $\mcal{C}^k$, et $\vc f\circ\vphi$ est de classe $\mcal{C}^{k+1}$. \end{proof} %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Difféomorphisme} %--------------------------------------------------------------------- Dans ce paragraphe, toutes les fonctions sont à valeurs réelles. Rappelons que si $J$ est un intervalle (non réduit à un point) et $\vphi$ une fonction \emph{continue} et \emph{strictement monotone}, \begin{itemize} \item $I=\vphi(J)$ est un intervalle de même nature que $J$; \item $\vphi$ réalise une bijection de $J$ sur $I$; \item l'application réciproque $\vphi^{-1}$ est continue et de même sens de monotonie que $\vphi$. \end{itemize} On dit alors que $\vphi$ réalise un \emph{homéomorphisme} de $J$ sur $I$. Rappelons encore que si $\vphi$ est un homéomorphisme de $J$ sur $I$ dérivable en un point $u$ de $J$, $\vphi^{-1}$ est dérivable en $a=\vphi(u)$ si, et seulement si, $\vphi'(u)\neq0$ et dans ce cas : $$ \bigl(\vphi^{-1}\bigr)'(a)=\ra1{\vphi'\bigl(\vphi^{-1}(a)\bigr)} $$ Ainsi, si $\vphi$ est un homéomorphisme de classe $\mcal{C}^1$ de $J$ sur $I$ et si $\vphi'$ ne s'annule pas sur $J$, $\vphi^{-1}$ est de classe $\mcal{C}^1$ sur $I$ puisque $t\mapsto \bigl(\vphi^{-1}\bigr)'(t)=1/\bigl(\vphi'(\vphi^{-1}(t))\bigr)$ est continue. \begin{Df}[$\mcal{C}^k$-difféomorphisme]\alaligne Une application $\vphi$ est un $\mcal{C}^k$-\emph{difféo\-mor\-phisme} de $J$ sur $I$ si $\vphi$ réalise une bijection de $J$ sur $I$ et si $\vphi$ et $\vphi^{-1}$ sont de classe $\mcal{C}^k$. \end{Df} \begin{Th}[Caractérisation des $\mcal{C}^k$-difféomorphismes]\alaligne Soit $J$ un intervalle non réduit à un point; $\vphi$ réalise un $\mcal{C}^k$-difféomorphisme de $J$ sur $I=\vphi(J)$ si, et seulement si, $\vphi$ est de classe $\mcal{C}^k$ sur $J$ et $\vphi'$ ne s'annule pas sur $J$. \end{Th} \begin{proof}\mbox{}\\ \CN C'est une conséquence de la définition, l'existence de la dérivée de $\varphi^{-1}$ impliquant la non nullité de $\varphi'$ sur $J$.\\ % \CS Démonstration par récurrence sur $k$. Puisque $\varphi'$ est une fonction continue qui ne s'annule pas sur l'intervalle $J$, $\varphi'$ est de signe constant sur $J$ et $\varphi$ est une fonction strictement monotone; $\varphi$ réalise donc un homéomorphisme de $J$ sur $I=\varphi(J)$ et $(\varphi^{-1})'=1/\bigl(\varphi'\circ \varphi^{-1}\bigr)$ ce qui assure la continuité de $(\varphi^{-1})'$ et montre que la propriété est vraie pour $k=1$. Supposons la propriété vraie au rang $k$. Soit $\varphi$ de classe $\mcal{C}^{k+1}$; en particulier $\varphi$ de classe $\mcal{C}^k$ et, puisque $\varphi'$ ne s'annule pas, $\varphi$ réalise un difféomorphisme de classe $\mcal{C}^k$ entre $J$ et $\varphi(J)$; le calcul de $(\varphi^{-1})'=1/\bigl(\varphi'\circ\varphi^{-1}\bigr)$ montre que $(\varphi^{-1})'$ est de classe $\mcal{C}^k$ et donc montre que $\varphi^{-1}$ est de classe $\mcal{C}^{k+1}$. \end{proof} %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Fonction de classe $\mcal{C}^k$ par morceaux} %--------------------------------------------------------------------- Généralisons la définition des fonctions continues par morceaux aux fonctions dérivables et de classe $\mcal{C}^k$ par morceaux. %-------------------------------------------------- \subsubsection{Définition} %-------------------------------------------------- \begin{Df}[Fonctions de classe $\mcal{C}^k$ par morceaux]\alaligne Soit $\intf ab$ un segment de $\R$; $\vc f$ est dite de classe $\mcal{C}^k$ \emph{par morceaux} sur le segment $\intf{a}{b}$, si, et seulement si, il existe une subdivision $(a_i)_{0\leq i\leq n}$ de $\intf ab$ telle que la restriction de $\vc f$ à chaque intervalle ouvert $\into{a_i}{a_{i+1}}$ se prolonge à une application de classe $\mcal{C}^k$ sur le segment $\intf{a_i}{a_{i+1}}$ Les fonctions de classe $\mcal{C}^k$ par morceaux sur $\intf ab$ à valeurs dans $E$ sont notées $\CMkabE{E}{k}$; $\CMkabE{\K}{k}$ est encore noté $\CMkab{}{k}$. Une fonction est dite de classe $\mcal{C}^k$ par morceaux sur un intervalle quelconque si, et seulement si, sa restriction à tout segment est de classe $\mcal{C}^k$ par morceaux. \end{Df} %-------------------------------------------------- \subsubsection{Dérivée d'une fonction de classe $\mcal{C}^k$ par morceaux} %-------------------------------------------------- Si $\vc f$ est une fonction de classe $\mcal{C}^k$ par morceaux sur le segment $\intf ab$, ses dérivées, jusqu'à l'ordre $k$, sont définies sur $\intf ab$ privé des points d'une partie finie, points d'une subdivision subordonnée à $\vc f$. On notera $\D^j \vc f$ la dérivée d'ordre $j$ et on pourra la prolonger par $\vc 0$ aux points de la subdivision pour en faire une fonction continue par morceaux. Caractérisons les fonctions $\vc f$ de classe $\mcal{C}^k$ par morceaux qui admettent une dérivée $\D\vc f$ égale à $\vc 0$. On a les propositions suivantes : \begin{Prop}[Caractérisation des fonctions en escalier]\alaligne Si $\vc f$ est de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux sur le segment $\intf ab$, $\vc f$ est en escalier si, et seulement si, $\D\vc f=\vc 0$. \end{Prop} \begin{proof} Soit $(a_i)_{0\leq i\leq n}$ une subdivision subordonnée à $\vc f$. Pour tout $i\in\Intf1n$, la restriction de $\vc f$ à l'intervalle ouvert $\into{a_{i-1}}{a_i}$ est constante si, et seulement si, sa dérivée est nulle sur cet intervalle. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Prop}[Caractérisation des fonctions constantes sur un segment]\alaligne Si $\vc f$ est \emph{continue} sur le segment $\intf ab$ et de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux sur $\intf ab$, $\vc f$ est constante si, et seulement si, $\D\vc f=\vc 0$. \end{Prop} \begin{proof} Les seules fonctions en escalier sur $\intf ab$ qui sont continues sur $\intf ab$ sont les fonctions constantes. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Prop}[Caractérisation des fonctions constantes sur un intervalle]\alaligne Si $\vc f$ est \emph{continue} sur l'intervalle $I$ et de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux sur $I$, $\vc f$ est constante si, et seulement si, $\D\vc f=\vc 0$. \end{Prop} \begin{proof} Appelons $(\intf{a_n}{b_n})_n$ une suite croissante pour l'inclusion de segments emboîtés dont la réunion est $I$. $\vc f$ est constante sur $I$ si, et seulement si, $\vc f$ est constante sur chaque $\intf{a_n}{b_n}$, puisque les segments sont inclus les uns dans les autres, et $\vc f$ fonction de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux, est constante sur chaque $\intf{a_n}{b_n}$ si, et seulement si, $\D\vc f$ est nulle sur chaque $\intf{a_n}{b_n}$, donc sur chaque segment de $I$. \end{proof} %--------------------------------------------------