%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \chapter{Intégrale des fonctions vectorielles sur un segment} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \minitoc \newpage %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% Intégrer des fonctions à valeurs vectorielles, passer à la limite à travers un signe~$\int$, échanger les signes $\sum$ et $\int$, étudier des fonctions définies à l'aide d'une intégrale dépendant d'un paramètre, voilà le programme des réjouissances. Dans ce chapitre, les fonctions sont définies sur un segment $S=\intf ab$ et sont à valeurs dans~$E$, $\K$-espace vectoriel normé de dimension finie, dont la norme est notée $\norme{\ }$. %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \section{Intégrale des fonctions en escalier} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% Cette section généralise aux fonctions vectorielles la définition et les propriétés de l'intégrale d'une fonction réelle en escalier vue en première année. C'est une section technique qui sert à mettre en place la section suivante; ne pas s'apesantir. %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Généralités} %--------------------------------------------------------------------- \begin{Df}[Intégrale d'une fonction en escalier]\alaligne Soient $\bvc\vphi$ une fonction en escalier sur le segment $S=\intf ab$ à valeurs dans $E$, $\sub\bphi=(a_k)_{0\leq k\leq n}$ une subdivision subordonnée à $\bphi$ du segment $S$, $\vc v_k$ la valeur constante de $\bphi$ sur l'intervalle ouvert $\into{a_{k-1}}{a_k}$ pour $k\in\Intf1n$. Le vecteur $\sum_{k=1}^n(a_k-a_{k-1})\vc v_k$ est indépendant de la subdivision $\sub\bphi$ choisie, il est appelé \emph{intégrale de $\bphi$ sur le segment} $S$ et noté $\int_S \bphi$, $\intab\bphi$ ou $\intab\bphi(t)\,\dt$. \Reponse{$\dsp \int_S \bphi=\intab\bphi=\intab\bphi(t)\,\dt= \sum_{k=1}^n(a_k-a_{k-1})\vc v_k $} \end{Df} \begin{proof} On pose $I(\bphi,\sub\bphi)=\sum_{k=1}^n(a_k-a_{k-1})\vc v_k$. Si on ajoute un point $\alpha\in\into{a_{i-1}}{a_i}$ à la subdivision $\sub\bphi$, on obtient : \begin{multline*} I(\bphi,\sub\bphi\cup\{\alpha\}) =\sum_{k=1}^{i-1}(a_k-a_{k-1})\vc v_k +(\alpha-a_{i-1})\vc v_i+(a_i-\alpha)\vc v_i +\sum_{k=i+1}^{n}(a_k-a_{k-1})\vc v_k \\ =\sum_{k=1}^{n}(a_k-a_{k-1})\vc v_k=I(\bphi,\sub\bphi) \end{multline*} Un raisonnement par récurrence montre qu'on ne change pas $I(\bphi,\sub\bphi)$ en ajoutant un nombre fini de points à $\sub\bphi$. Si $\sigma_1$ et $\sigma_2$ sont deux subdivisions subordonnées à $\bphi$, $\sigma_1\cup\sigma_2$ est encore une subdivision subordonnée à $\bphi$; elle ne diffère de $\sigma_1$ et $\sigma_2$ que d'un nombre fini de points; ainsi $$ I(\bphi,\sigma_1)=I(\bphi,\sigma_1\cup\sigma_2)=I(\bphi,\sigma_2) $$ \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{NBs}\alaligne Si $\vphi$ est une fonction en escalier à valeurs réelles positives, $\intab\vphi$ s'interprète comme l'aire de la portion de plan comprise entre les droites $t=a$, $t=b$, l'axe $Ot$ et le graphe de $\vphi$. $\intab\bphi$ ne dépend pas des valeurs de $\bphi$ prises aux points $a_k$ pour $k\in\Intf0n$. Si $\bphi$ est une fonction constante égale à $\vc v$ sauf en un nombre fini de points de $\intf ab$, $\bphi$ est en escalier et $\intab\bphi=(b-a)\vc v$. En particulier, si $\bphi$ est nulle sauf sur un ensemble fini, $\intab \bphi=\vc 0$. \end{NBs} %-------------------------------------------------- \subsection{Linéarité par rapport à la fonction} %-------------------------------------------------- \begin{Prop} Si $\bphi$ et $\bpsi$ sont deux fonctions en escalier sur $\intf ab$, et $\lambda$ et $\mu$ deux scalaires, on a : $$ \intab (\lambda\bphi+\mu\bpsi)=\lambda\intab\bphi+\mu\intab\bpsi $$ \end{Prop} \begin{proof} Soient $\sigma=(a_k)_{0\leq k\leq n}$ une subdivision subordonnée à $\bphi$ \emph{et} $\bpsi$, $\vc v_k$ (resp. $\vc w_k$) la valeur constante de $\bphi$ (resp. $\bpsi$) sur l'intervalle ouvert $\into{a_{k-1}}{a_k}$, alors : $$ \qqs k\in\Intf1n,\ \qqs t\in\into{a_{k-1}}{a_k},\ \lambda\bphi(t)+\mu\bpsi(t)=\lambda\vc v_k+\mu\vc w_k $$ et \begin{equation} \begin{split} \intab (\lambda\bphi+\mu\bpsi) &=\sum_{k=1}^n (a_k-a_{k-1})(\lambda\vc v_k+\mu\vc w_k) \\ &=\lambda\sum_{k=1}^n(a_k-a_{k-1})\vc v_k +\mu\sum_{k=1}^n(a_k-a_{k-1})\vc w_k \\ &=\lambda\intab\bphi+\mu\intab\bpsi \end{split} \end{equation} \end{proof} %-------------------------------------------------- %-------------------------------------------------- \subsection{Image de l'intégrale par une application linéaire} %-------------------------------------------------- \begin{Prop} Soient $\bphi$ une fonction en escalier sur $\intf ab$ et $\vc u$ une application linéaire de $E$ vers $F$; alors : $$ \vc u\Bigl(\intab\bphi\Bigr)=\intab\vc u\circ\bphi $$ \end{Prop} \begin{proof} Soient $\sigma=(a_k)_{0\leq k\leq n}$ une subdivision subordonnée à $\bphi$, $\vc v_k$ la valeur constante de $\bphi$ sur l'intervalle ouvert $\into{a_{k-1}}{a_k}$; alors $\vc u(\vc v_k)$ est la valeur de $\vc u\circ\bphi$ sur $\into{a_{k-1}}{a_k}$ et, utilisant la linéarité de $\vc u$, on obtient : \begin{equation} \begin{split} \vc u\Bigl(\intab\bphi\Bigr) &=\vc u\bigl(\sum_{k=1}^n (a_k-a_{k-1})\vc v_k)\bigr) =\sum_{k=1}^n(a_k-a_{k-1})\vc u(\vc v_k) \\ &=\intab\vc u\circ\bphi \end{split} \end{equation} \end{proof} %---------------------------------------------------------------------- %-------------------------------------------------- \subsection{Inégalité de la moyenne} %-------------------------------------------------- \begin{Prop} Si $\bphi$ une fonction en escalier sur $\intf ab$, on a : $$ \norme[\Big]{\intab\bphi} \leq\intab\norme{\bphi} \leq(b-a)\sup_{t\in\intf ab}\norme{\bphi(t)} $$ \end{Prop} \begin{proof} Soient $\sigma=(a_k)_{0\leq k\leq n}$ une subdivision subordonnée à $\bphi$, $\vc v_k$ la valeur constante de $\bphi$ sur l'intervalle ouvert $\into{a_{k-1}}{a_k}$; alors $\norme{\vc v_k}$ est la valeur de $\norme{\bphi}$ sur $\into{a_{k-1}}{a_k}$ et : \begin{multline} \norme[\Big]{\intab\bphi} =\norme[\Big]{\sum_{k=1}^n (a_k-a_{k-1})\vc v_k} \leq\sum_{k=1}^n(a_k-a_{k-1})\norme{\vc v_k}=\intab\norme{\bphi} \\ \leq\sum_{k=1}^n(a_k-a_{k-1})\sup_{t\in\intf ab}\norme{\bphi(t)} =(b-a)\sup_{t\in\intf ab}\norme{\bphi(t)} \end{multline} \end{proof} %---------------------------------------------------------------------- %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \section{Intégrale des fonctions continues par morceaux} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% Nous continuons la généralisation du cours de première année : ce paragraphe propose de définir l'intégrale des fonctions à valeurs dans $E$ et continues par morceaux sur un segment de $\R$. %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Définition de l'intégrale} %--------------------------------------------------------------------- L'intégrale est définie à l'aide d'un passage à la limite. L'intégrale d'une fonction en escalier est connue; une fonction continue par morceaux sur un segment est limite uniforme sur ce segment d'une suite de fonctions en escalier; par définition, l'intégrale d'une fonction continue par morceaux est définie par la limite des intégrales de cette suite de fonctions en escalier. \begin{Lem} Soient $\vc f$ une fonction à valeurs dans $E$ et continue par morceaux sur le segment $\intf ab$, et ${(\bphi_n)}_n$ une suite de fonctions en escalier qui converge uniformément vers $\vc f$ sur $\intf ab$; alors, \begin{prop} \item la suite des intégrales ${( {\intab}\bphi_n)}_n$ admet une limite dans $E$; \item cette limite ne dépend que $\vc f$ et non pas de la suite ${(\bphi_n)}_n$. \end{prop} \end{Lem} \begin{proof}\alaligne \begin{demprop} \monitem Montrons que ${( {\intab}\bphi_n)}_n$ est une suite de Cauchy dans $E$. Puisque la suite ${(\bphi_n)}_n$ converge uniformément sur $\intf ab$ vers $\vc f$, on a : \begin{gather*} \qqs\eps>0,\ \exists N\in\N,\ \qqs n\in\N,\ \qqs t\in\intf ab,\ n>N\implique\norme{\bphi_n(t)-\vc f(t)}<\eps \\ \begin{split} \text{donc\quad} &\qqs(n,p)\in\N^2,\ \qqs t\in\intf ab, \\ & n>N\implique\norme{\bphi_n(t)-\bphi_{n+p}(t)} \leq\norme{\bphi_{n+p}(t)-\vc f(t)}+\norme{\bphi_{n}(t)-\vc f(t)}<2\eps \end{split} \\ \text{et\quad}\qqs(n,p)\N^2,\ n>N\implique \sup_{t\in\intf ab}\norme{\bphi_{n+p}(t)-\bphi_n(t)}\leq2\eps \end{gather*} Ainsi, pour tout $p\in\N$ et tout $n>N$, on a : $$ \norme[\Big]{\intab\bphi_{n+p}-\intab\bphi_n} =\norme[\Big]{\intab(\bphi_{n+p}-\bphi_n)} \leq(b-a)\sup_{t\in\intf ab}\norme{\bphi_{n+p}-\bphi_n}\leq2(b-a)\eps $$ La suite ${( {\intab}\bphi_n)}_n$ est donc convergente puisqu'elle est de Cauchy dans $E$. \monitem Soit ${(\bpsi_n)}_n$ une autre suite de fonctions en escalier qui converge uniformément vers $\vc f$ sur $\intf ab$. On considère la suite ${(\bvc\rho_n)}_n$ définie par : $$ \qqs p\in\N,\ \bvc\rho_{2p}=\bphi_p\text{ et }\bvc\rho_{2p+1}=\bpsi_p $$ La suite ${(\bvc\rho_n)}_n$ converge uniformément vers $\vc f$ sur $\intf ab$; la suite ${( {\intab}\bvc\rho_n)}_n)$ admet donc une limite dans $E$ et les deux suites extraites ${( {\intab}\bphi_p)}_p$ et ${( {\intab}\bpsi_p)}_p$ admettent cette même limite. \end{demprop} \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Df}[Intégrale d'une fonction continue par morceaux]\alaligne Soient $\vc f$ une fonction continue par morceaux sur le segment $S=\intf ab$ et ${(\bphi_n)}_n$ une suite de fonctions en escalier qui converge uniformément vers $\vc f$ sur $\intf ab$; on appelle \emph{intégrale de} $\vc f$ la limite de la suite ${( {\intab}\bphi_n)}_n$ et on la note $\int_S\vc f$, $\intab\vc f$ ou $\intab\vc f(t)\,\dt$. \Reponse{ Si $\suite\bphi$ est une suite de fonctions en escalier qui converge uniformément vers $f$ sur $\intf ab$,\\ $\dps\intab\vc f=\intab\vc f(t)\,\dt=\lim_n\intab\bphi_n $} \end{Df} \begin{NBs}\alaligne Cette définition est compatible avec la précédente; si $\vc f$ est une fonction en escalier, la suite constante égale à $\vc f$ converge uniformément vers $\vc f$ sur $\intf ab$. Cette définition est aussi compatible avec celle de première année : si $f$ est une fonction réelle, les fonctions en escalier majorante et minorante à $(n+1)^{-1}$ près définissent une suite de fonctions en escalier qui converge uniformément vers $f$ sur $\intf ab$. \end{NBs} %-------------------------------------------------- \subsection{Linéarité par rapport à la fonction} %-------------------------------------------------- \begin{Prop} Si $\vc f$ et $\vc g$ sont deux fonctions continues par morceaux sur $\intf ab$, et $\lambda$ et $\mu$ deux scalaires, on a : $$ \intab(\lambda\vc f+\mu\vc g)=\lambda\intab\vc f+\mu\intab\vc g $$ autrement dit, $\vc f\in\CMabE{E}\mapsto\intab\vc f$ est linéaire. \end{Prop} \begin{proof} Soit ${(\bphi_n)}_n$ (resp. ${(\bpsi_n)}_n$) une suite de fonctions en escalier qui converge uniformément vers $\vc f$ (resp. $\vc g$); alors ${(\lambda\bphi_n+\mu\bpsi_n)}_n$ est une suite de fonctions en escalier qui converge uniformément vers $\lambda\vc f+\mu\vc g$ sur $\intf ab$, et : \begin{equation} \intab(\lambda\bphi_n+\mu\bpsi_n) =\lambda\intab\bphi_n+\mu\intab\bpsi_n \tend\lambda\intab\vc f+\mu\intab\vc g \end{equation} \end{proof} %-------------------------------------------------- \subsection{Intégrale de deux fonctions qui coïcident sauf sur une partie finie d'un segment} %-------------------------------------------------- \begin{Prop} Deux fonctions continues par morceaux qui coïcident sur une partie finie de $\intf ab$ ont des intégrales égales. \end{Prop} \begin{proof} Nommons-les $\vc f$ et $\vc g$; alors $\vc g-\vc f$ est nulle sauf sur une partie finie de $\intf ab$, donc en escalier et : \begin{equation} \vc 0=\intab(\vc g-\vc f)=\intab\vc g-\intab\vc f \end{equation} \end{proof} Si $\vc f$ est une fonction définie sur $\intf ab$ privé d'une subdivision $\sigma=(a_k)_{0\leq k\leq n}$, et si, pour tout $k\in\Intf1n$ la restriction de $\vc f$ à chacun des intervalles ouverts $\into{a_{k-1}}{a_k}$ est prolongeable par continuité sur $\intf{a_{k-1}}{a_k}$, on définit l'intégrale de $\vc f$ par l'intégrale de l'un quelconque de ses prolongements $\tilde{\vc f}$, qui est une fonction continue par morceaux. Remarquez que $\tilde{\vc f}$ n'est pas, en général, continue en $a_k$. %-------------------------------------------------- \subsection{Image de l'intégrale par une application linéaire} %-------------------------------------------------- \begin{Prop} Soient $\vc f\in\CMabE$ et $\vc u$ une application linéaire de $E$ vers $F$; alors $$ \vc u\Bigl(\intab\vc f\Bigr)=\intab\vc u\circ\vc f $$ \end{Prop} \begin{proof} La propriété est vraie pour les fonctions en escalier; un passage à la limite donne le résultat pour les fonctions continues par morceaux. Soit ${(\bphi_n)}_n$ une suite de fonctions en escalier qui converge uniformément vers~$\vc f$; $\vc u$, application linéaire entre espaces vectoriels de dimension finie, est continue et lipschitzienne; ${(\vc u\circ\bphi_n)}_n$ est une suite de fonctions en escalier qui converge uniformément vers $\vc u\circ\vc f$ sur $\intf ab$ car \begin{gather*} \qqs t\in\intf ab,\ \norme{\vc u\bigl(\bphi_n(t)\bigr)-\vc u\bigl(\vc f(t)\bigr)}_F \leq k_{\vc u}\norme{\bphi_n(t)-\vc f(t)}_E \\ \et \sup_{t\in\intf ab} \norme{\vc u\bigl(\bphi_n(t)\bigr)-\vc u\bigl(\vc f(t)\bigr)}_F \leq k_{\vc u}\sup_{t\in\intf ab}\norme{\bphi_n(t)-\vc f(t)}_E\tend 0 \end{gather*} Ainsi, $\intab\vc u\circ\bphi_n$ tend vers $\intab\vc u\circ\vc f$. La continuité de $\vc u$ implique que $\vc u(\intab\bphi_n)$ tend vers $\vc u(\intab\vc f)$. L'égalité pour tout $n\in\N$ de $\vc u\bigl(\intab\bphi_n\bigr)$ avec $\intab\vc u\circ\bphi_n$ et l'unicité de la limite donnent le résultat. \end{proof} %-------------------------------------------------- Supposons $E$ muni d'une base $\mathcal{B}=(\vc e_1,\vc e_2,\dots,\vc e_p)$; il est maintenant bien connu que toute application $\vc f$ se décompose sur cette base et on peut écrire pour tout $t\in\intf ab$ : $\vc f(t)=\sum_{k=1}^pf_k(t)\vc e_k$. Dans ces conditions, on a le : \begin{Cor}[Intégrale et coordonnées]\alaligne $\vc f$ est continue par morceaux sur $\intf ab$ si, et seulement si, les composantes $f_k$ le sont, et : $$ \intab\vc f=\sum_{k=1}^p\Bigl(\intab f_k\Bigr)\vc e_k $$ \end{Cor} \begin{proof} On note $\vc e_k^*$ la forme linéaire qui, à un vecteur de $E$, associe sa $k$\ieme composante relative à la base $\mathcal{B}$. $\vc e_k^*$ est continue (car linéaire) et $f_k=\vc e_k^*\circ\vc f$ est continue par morceaux si $\vc f$ l'est. $\lambda\in\K\mapsto\lambda\vc v$ est continue (car linéaire) et $f_k\vc e_k$ est continue par morceaux si $f_k$ l'est. L'équivalence annoncée est démontrée. L'application du théorème précédent à $\vc e_k^*$ montre que $\vc e_k^*(\intab\vc f)$, la composante de $\intab\vc f$ relative à $\vc e_k$, vaut $\intab\vc e_k^*(\vc f)=\intab f_k$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Cor}[Cas des fonctions complexes]\alaligne $f\in\CMabE{\C}$ si, et seulement si, $\RE(f)$ et $\IM(f)$ appartiennent à $\CMabE{\R}$ si, et seulement si, $\conjug{f}\in\CMabE{\C}$ et : \Reponse{$\dps \RE\Bigl(\intab f\Bigr)=\intab\RE(f),\ {} \IM\Bigl(\intab f\Bigr)=\intab\IM(f),\ {} \intab\conjug{f}=\conjug{\intab f} $} \end{Cor} \begin{proof} C'est un cas particulier du corollaire précédent. \end{proof} %-------------------------------------------------- %-------------------------------------------------- \subsection{Inégalité de la moyenne} %-------------------------------------------------- \begin{Df}[Valeur moyenne d'une fonction sur un segment]\alaligne Si $\vc f\in\CMabE{E}$, la \emph{valeur moyenne} de $\vc f$ sur $\intf ab$ est le vecteur $\dsp\ra1{b-a}\intab\vc f$. \end{Df} \begin{Th}[Inégalité de la moyenne]\alaligne Si $\vc f$ est continue par morceaux, l'application $\norme{\vc f} : t\mapsto\norme{\vc f(t)}$ est continue par morceaux et : \Reponse{$\dps \norme[\Big]{\intab\vc f} \leq \intab\norme{\vc f} \leq(b-a)\sup_{t\in\intf ab}\norme{\vc f(t)} $} \end{Th} \begin{proof} Soit ${(\bphi_n)}_n$ une suite de fonctions en escalier qui converge uniformément vers $\vc f$ sur le segment $\intf ab$; alors la suite ${(\norme{\bphi_n})}_n$ converge uniformément vers $\norme{\vc f}$ sur $\intf ab$, et ${(\sup_{t\in\intf ab}\norme{\bphi_n(t)})}_n$ converge vers $\sup_{t\in\intf ab}\norme{\vc f(t)}$. Des inégalités : $$ \norme[\Big]{\intab\bphi_n} \leq \intab\norme{\bphi_n} \leq(b-a)\sup_{t\in\intf ab}\norme{\bphi_n(t)} $$ on tire, par passage à la limite sur $n$ : $$ \norme[\Big]{\intab\vc f} \leq \intab\norme{\vc f} \leq(b-a)\sup_{t\in\intf ab}\norme{\vc f(t)} $$ \end{proof} %-------------------------------------------------- \subsection{Positivité et croissance de l'intégrale}\mbox{} %-------------------------------------------------- Dans tout ce paragraphe, les fonctions sont à valeurs réelles. \begin{Th}[Positivité de l'intégrale]\alaligne Si $f$ est une fonction continue par morceaux à valeurs \emph{réelles positives} sur $\intf ab$ (avec comme toujours $a<b$), l'intégrale de $f$ sur $\intf ab$ est positive. \Reponse{$\dsp f\text{ continue par morceaux et }\qqs t\in\intf ab,\ f(t)\geq0 \implique\intab f\geq0 $} \end{Th} \begin{proof} Si $f$ est positive, $|f|=f$ et l'inégalité de la moyenne $\intab f=\intab|f|\geq\abs{\intab f}\geq0$ donne le résultat. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Croissance de l'intégrale]\alaligne Si $f$ et $g$ sont deux fonctions continues par morceaux à valeurs réelles telles que $f$ soit plus petite que $g$, l'intégrale de $f$ est plus petite que l'intégrale de $g$. \Reponse{$\dsp (f,g)\in\CMabE{\R}^2\et\qqs t\in\intf ab,\ f(t)\leq g(t) \implique\intab f\leq\intab g $} \end{Th} \begin{proof} $(g-f)$ est une fonction continue par morceaux et à valeurs réelles positives; la positivité et la linéarité de l'intégrale donne le résultat : \begin{equation} 0\leq\intab(g-f)=\intab g-\intab f \end{equation} \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Caractérisation des fonctions nulles]\alaligne Une fonction $f$ \emph{continue et à valeurs positives} sur un segment $\intf ab$ est nulle si, et seulement si, son intégrale est nulle. \Reponse{$ \dsp f\in\CabE{\R}\et\qqs t\in\intf ab,\ f(t)\geq0\qquad\intab f=0\iff f=0 $} \end{Th} \begin{proof} Seule la condition nécessaire nécessite une démonstration. Démontrons la contraposée et prenons une fonction $f$ \emph{continue, positive et non nulle} (\og non nulle\fg{} sigifie \og qui n'est pas la fonction nulle\fg{}, ou enore \og non identiquement nulle\fg; ne pas confondre avec une fonction qui ne s'annule pas). S'il existe $t_0\in\into ab$ tel que $f(t_0)>0$, il existe aussi $\eta>0$ tel que pour tout $t\in\into{t_0-\eta}{t_0+\eta}$ on ait $t\in\into ab$ et $f(t)\geq\ra12f(t_0)$ (continuité de $f$ en $t_0$). On appelle $\vphi$ la fonction en escalier qui vaut $\ra12 f(t_0)$ sur $\into{t_0-\eta}{t_0+\eta}$ et qui est nulle en dehors. Ainsi $f\geq\vphi$ et $\intab f\geq\intab\vphi=\eta\,f(t_0)>0$ Sinon, pour tout $t\in\into ab$, $f(t)=0$ et, par continuité, $f=0$ sur $\intf ab$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{NBs} Une fonction $f$ continue par morceaux et à valeurs positives sur un segment $\intf ab$ est d'integrale nulle si, et seulement si, $f$ est nulle sur $\intf ab$ sauf en ses points de discontinuité qui sont en nombre fini. Une fonction $f$ continue morceaux, à valeurs positives sur un segment $\intf ab$ et strictement positive en un point de continuité, a une intégrale strictement positive sur $\intf ab$. \end{NBs} \begin{Th}[Inégalité de la moyenne, extension aux produits]\alaligne Soient $(E,\norme{\ }_E)$, $(F,\norme{\ }_F)$ et $(G,\norme{\ }_G)$ trois $\K$-espaces vectoriels de dimension finie, $B$ une application bilinéaire de $E\times F$ dans $G$, $k>0$ une constante telle que $\norme{B(\vc x,\vc y)}_G\leq k\norme{\vc x}_E\norme{\vc y}_F$ pour tout $(\vc x,\vc y)\in E\times F$; alors, pour toute application $\vc f$ (resp. $\vc g$) continue par morceaux sur $\intf ab$ et à valeurs dans $E$ (resp. $F$), on a : $$ \norme[\Big]{\intab B(\vc f,\vc g)}_G \leq k\sup_{t\in\intf ab}\norme{\vc f(t)}_E\intab\norme{\vc g}_F $$ En particulier, si $(f,g)\in\CMabE{\R}^2$ et $g$ à valeurs \emph{positives}, on a : $$ \inf_{t\in\intf ab}\{f(t)\}\intab g \leq\intab fg\leq\sup_{t\in\intf ab}f(t)\intab g $$ \end{Th} \begin{proof} Rappelons que $B$ est une aplication continue ce qui montre que $t\mapsto B\bigl(\vc f(t),\vc g(t)\bigr)$ est continue par morceaux. On peut écrire les inégalités : \begin{equation} \qqs t\in\intf ab,\ \norme{B\bigl(\vc f(t),\vc g(t)\bigr)}_G\leq k\norme{\vc f(t)}_E\norme{\vc g(t)}_F \leq k\sup_{t\in\intf ab}\{\norme{\vc f(t)}_E\}\norme{\vc g(t)}_F \end{equation} et la positivité de l'intégrale donne la relation. L'inégalité $\inf_{\intf ab}\{f(t)\}\leq f(t)\leq\sup_{t\in\intf ab}\{f(t)\}$ donne, par multiplication par le nombre \emph{positif} $g(t)$ : \begin{equation} \qqs t\in \intf ab,\ \inf_{\intf ab}\{f(t)\}\,g(t)\leq f(t)g(t)\leq\sup_{t\in\intf ab}\{f(t)\}\,g(t) \end{equation} et la positivité de l'intégrale donne la relation. \end{proof} %-------------------------------------------------- %-------------------------------------------------- \subsection{Additivité de l'intégrale par rapport à l'intervalle d'intégration} %-------------------------------------------------- \begin{Prop}[Restriction de l'intervalle d'intégration]\alaligne Si $K$ est un segment contenu dans $\intf ab$ et $\chi_K$ la fonction caractéristique de $K$, on a : $$ \int_K\vc f=\intab\chi_K\vc f $$ \end{Prop} \begin{proof} Soient $\bphi$ est une fonction en escalier sur $\intf ab$, $\sub{\bphi}$ une subdivision subordonnée qui contient les extrémités de $K$ (sinon, on les ajoute); alors les fonctions $\bphi\big\rvert_K$ et $\chi_K\bphi$ coïncident sur $K$ et les intégrales sont égales. L'égalité est donc vraie pour les fonctions en escalier. Soit ${(\bphi_n)}_n$ une suite de fonctions en escalier qui converge uniformément vers $\vc f$; alors, la suite ${(\bphi_n\rvert_K)}_n$ (resp. ${(\bphi_n\chi_K)}_n$) convergent uniformément vers $\vc f\rvert_K$ (resp. $\chi_K\vc f$) sur $K$ (resp. $\intf ab$). Un passage à la limite donne le résultat. \end{proof} %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Notation $\int_a^b$} %--------------------------------------------------------------------- Retrouvons la notation habituelle de l'intégrale : $\int_a^b\vc f$ grâce à la : \begin{Df}[Extension de la notation $\int_a^b\vc f$]\alaligne Soient $I$ un intervalle et $\vc f$ une fonction continue par morceaux sur $I$; alors pour $(a,b)\in I^2$, on pose : \begin{equation*} \int_a^b\vc f= \begin{cases} \quad \intab\vc f &\text{si $a<b$} \\ \quad-\int_{\intf ba}\vc f &\text{si $b<a$} \\ \quad\vc 0 &\text{si $a=b$} \end{cases} \end{equation*} \end{Df} Avec cette nouvelle définition, on retrouve les propriétés fondamentales de l'intégrale : relation de Chasles, linéarité par rapport à la fonction et inégalité de la moyenne. Seule la positivité a besoin que les bornes de l'intervalle d'intégration soient dans le \og bon sens\fg. \begin{Th}[Relation de Chasles]\alaligne Si $\vc f$ est une fonction continue parmorceaux sur $I$ et $a$, $b$ et $c$ trois éléments de $I$, alors : $$ \int_a^b\vc f + \int_b^c\vc f=\int_a^c\vc f $$ \end{Th} \begin{proof} Regardez les six cas possibles de placement de trois nombres $a$, $b$ et $c$ les uns par rapport aux autres. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Linéarité]\alaligne Si $a$ et $b$ sont deux points de $I$, l'application qui à $\vc f\in\CMIE$ associe $\int_a^b\vc f$ est une application linéaire. \end{Th} \begin{proof} Envisagez les cas $a<b$, $a>b$ et $a=b$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Inégalité de la moyenne]\alaligne Si $a$ et $b$ sont deux points de $I$ et $\vc f$ une fonction continue par morceaux, on a : \Reponse{$\dps \norme[\Big]{\int_a^b \vc f} \leq \abs[\Big]{\int_a^b \norme{\vc f}} \leq \abs{b-a}\sup_{t\in\intf ab}\norme{\vc f(t)} $} \end{Th} \begin{proof} Envisagez les cas $a<b$, $a>b$ et $a=b$. \end{proof} %-------------------------------------------------- %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \section{Convergences en moyenne et en moyenne quadratique} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% Les fonctions considérées sont définies sur le segment $\intf ab$ et à valeurs dans $\C$; elles sont continues ou continues par morceaux sur $\intf ab$. On note $\Cab$ (resp. $\CMab$) l'espace des fonctions complexes continues (resp. continues par morceaux) sur le segment $\intf ab$. Puisque $a<b$ les intégrales s'écriront indifféremment $\intab$ ou $\int_a^b$. %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Norme de la convergence en moyenne sur $\Cab$} %--------------------------------------------------------------------- \Reponse{$\dsp \normu{f}=\intab\abs{f}=\int_{t=a}^b\abs{f(t)}\,\dt $} $\normu{\ }$ est une norme sur $\Cab$; cette norme est appelée \emph{norme de la convergence en moyenne} sur $\intf ab$. %---------------------------------------------------------------------- \subsubsection*{Extension à $\CMab$} %---------------------------------------------------------------------- Imposons à toute fonction $f\in\CMab$ d'avoir la valeur 0 en tout point de discontinuité; cette convention conserve la valeur de l'intégrale de $f$. Avec cette convention, $\int_a^b\abs{f}=0$ si, et seulement si, $\abs{f(t)}=0$ en tout point de continuité de $f$ et donc en tout point de $\intf ab$. Ainsi $\normu{\,}$ est encore une norme sur $\CMab$. %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Produit scalaire sur $\Cab$} %--------------------------------------------------------------------- \begin{Df} Soient $f$ et $g$ deux fonctions continues sur $\intf ab$; on pose : \Reponse{$\dsp \scal fg=\intab\conjug{f}g=\int_{t=a}^b\conjug{f(t)}g(t)\,\dt $} \end{Df} \begin{Th}[Produit scalaire sur $\Cab$]\alaligne $\scal{\ }{\ }$ est un produit scalaire sur le $\K$-espace vectoriel $\Cab$ des fonctions à valeurs dans $\K$ continues sur le segment $\intf ab$. \end{Th} \begin{proof} Linéarité à droite, symétrie (éventuellement hermitienne) et positivité sont évidentes; $0=\scal ff=\int_a^b\abs{f}^2$ implique $\abs{f}=0$ puisque $f$ est continue. \end{proof} %---------------------------------------------------------------------- %---------------------------------------------------------------------- \subsubsection*{Extension aux fonctions continues par morceaux} %---------------------------------------------------------------------- En utilisant toujours la même convention, on donne la valeur 0 en tout point de discontinuité de la fonction, $\scal{\ }{\ }$ reste un produit scalaire sur $\CMab$, $0=\scal ff=\int_I\abs{f}^2$ implique $\abs{f(t)}=0$ en tout point de continuité de $f$ donc en tout point de $I$. %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Norme de la convergence en moyenne quadratique} %--------------------------------------------------------------------- \Reponse{$\dsp \normd{f}=\sqrt{\scal ff}=\sqrt{\intab\abs{f}^2} =\sqrt{\int_a^b\abs{f(t)}^2\,\dt} $} $\normd{\ }$ est une norme sur $\Cab$; cette norme est appelée \emph{norme de la convergence en moyenne quadratique} sur $\intf ab$; c'est la norme associée au produit scalaire. Avec la convention de nullité de la fonction en tous ses points de discontinuité, $\normd{\ }$ est une norme sur $\CMab$. \begin{Th}[Inégalité de Cauchy-Schwarz]\alaligne Si $f$ et $g$ sont continues par morceaux sur $\intf ab$, on a \Reponse{$\dps \abs{\scal fg}=\abs[\Big]{\int_a^b\conjug{f}g}\leq\normd{f}\,\normd{g}= \sqrt{\int_a^b\abs{f}^2}\sqrt{\int_a^b\abs{g}^2} $} L'inégalité de Cauchy-Schwarz est une égalité si, et seulement si, $f$ et $g$ sont liées, \ie{} proportionnelles. \end{Th} \begin{proof} On retrouve l'inégalité de Cauchy-Schwarz déjà démontrée dans le cas général d'un produit scalaire réel ou hermitien complexe. \end{proof} %---------------------------------------------------------------------- \begin{Prop}[Comparaison des normes $\normu{\ }$, $\normd{\ }$ et $\normi{\ }$]\alaligne Si $f$ est continue par morceaux sur $\intf ab$, on a : $$ \normd{f}\leq\sqrt{b-a}\normi{f},\qquad \normu{f}\leq\sqrt{b-a}\normd{f} $$ \end{Prop} \begin{proof}\alaligne\\ $\normd{f}^2=\int_a^b\abs{f}^2\leq(b-a)\sup_{t\in\intf ab}\abs{f(t)}^2 =(b-a)\normi{f}^2$ \\ $\normu{f}=\int_a^b 1\cdot\abs{f}=\scal1{\abs f}\leq\normd 1\normd f =\sqrt{b-a}\normd{f}$ \end{proof} %---------------------------------------------------------------------- %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \section{Intégration des suites de fonctions continues} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% Un petit paragraphe d'une grande importance pratique; nous obtiendrons des conditions suffisantes pour permettre la permutation des signes $\lim$ et $\int$ et des signes $\sum$ et $\int$. %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Convergence uniforme et convergence en moyenne} %--------------------------------------------------------------------- \begin{Th}[Convergence uniforme et convergence en moyenne]\alaligne Si $(f_n)_n$ est une suite de fonctions continues qui converge uniformément vers $f$ sur~$\intf ab$, la suite $(f_n)_n$ converge en moyenne vers $f$ et : \Reponse{$\dsp \lim_n\intab f_n=\intab f=\intab\lim_n f_n $} \end{Th} \begin{proof} Puisque les fonctions $f_n$ sont continues sur $\intf ab$ et que la suite $(f_n)_n$ converge uniformément, $f$ est continue et : \begin{equation} \Bigl|\int_a^b f_n-\int_a^b f\Bigr|\leq\int_a^b\abs{f_n-f}=\normu{f_n-f} \leq(b-a)\normi{f_n-f}\tend0 \end{equation} ce qui montre que $\int_a^b f_n$ tend vers $\int_a^b f$ et que la convergence uniforme sur $\intf ab$ implique la convergence en moyenne. \end{proof} %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Intégration terme à terme d'une série de fonctions continues} %--------------------------------------------------------------------- \begin{Th} Si $(u_n)_n$ est une suite de fonctions continues et si la série $\sum u_n$ converge uniformément sur $\intf ab$, la série des intégrales $\sum\intab u_n$ est convergente et : \Reponse{$\dsp \intab\sum_{n=0}^\infty u_n=\sum_{n=0}^\infty \intab u_n $} \end{Th} \begin{proof} Appelons $(S_n)_n$ la suite des sommes partielles; c'est une suite de fonctions continues (les $u_n$ le sont) qui converge uniformément sur $\intf ab$ vers la somme $s$ de la série $\sum u_n$. D'aprés le théorème précédent, on a \begin{equation} \int_a^b S_n=\sum_{k=0}^n\int_a^b u_k\tend \int_a^b S=\int_a^b\sum_{n\geq0}u_n \end{equation} ce qui montre que $\sum\int_a^b u_n$ est une série convergente dont la somme est $\int_a^b\sum_{n\geq0}u_n$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Cas de la convergence normale]\alaligne Si $(u_n)_n$ est une suite de fonctions continues et si la série $\sum u_n$ converge normalement sur $\intf ab$, la série des intégrales $\sum\intab\abs{u_n}$ est convergente et : \Reponse{$\dsp \normeun[\Big]{\sum_{n=0}^\infty u_n} =\intab \abs[\Big]{\sum_{n=0}^\infty u_n} \leq\sum_{n=0}^\infty \intab \abs{u_n}=\sum_{n=0}^\infty \normu{u_n} $} \end{Th} \begin{proof} Si la convergence est normale sur $\intf ab$, elle est absolue et uniforme, et : \begin{equation} \abs[\Big]{\sum_{n=0}^\infty u_n(t)} \leq \sum_{n=0}^\infty \abs{u_n(t)} \leq \sum_{n=0}^\infty \normi{u_n}\et \normu{u_n}=\int_a^b\abs{u_n}\leq(b-a)\normi{u_n} \end{equation} ce qui montre la convergence de $\sum\intab\abs{u_n}$ et l'inégalité annoncée. \end{proof} %-------------------------------------------------- %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Convergence simple et convergence en moyenne} %--------------------------------------------------------------------- Peut-on affaiblir la condition de convergence uniforme pour passer à la limite à travers in signe $\intab$? Oui, c'est l'objet du \begin{Th}[de convergence dominée]\alaligne Si $\suite f$ est une suite de fonctions continues par morceaux sur $\intf ab$ et à valeurs réelles ou complexes telle que \begin{itemize} \item la suite $\suite f$ converge simplement sur $\intf ab$ vers une fonction $f$ continue par morceaux; \item il existe une fonction continue par morceaux $\vphi$ à valeurs réelles positives telle que : $$ \qqs(n,t)\in\N\times I,\ \abs{f_n(t)}\leq\vphi(t) \qquad\text{ (hypothèse de domination)} $$ \end{itemize} alors $$ \int_a^b f=\int_a^b\lim_n f_n=\lim_n\int_a^b f_n $$ \end{Th} \begin{proof} La démonstration est admise. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{NB} Puisque toute fonction en escalier sur un segment est bornée sur ce segment, on peut remplacer la fonction $\vphi$ du théorème de convergence dominée par une (fonction) constante, indépendante de $t\in\intf ab$ et $n\in\N$. \end{NB} \begin{Ex} $\dps\lim_n\int_0^{\ra\pi2}\sin^n t\,\dt=\int_0^{\ra\pi2}\chi_{\{\ra\pi2\}}=0$\\ car $\qqs(n,t)$, $\abs{\sin^n t}\leq1$ et $\qqs t\in\intfo0{\ra\pi2}$, $\lim_n\sin^n t=0$. \end{Ex} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \section{Primitives et intégrale d'une fonction continue} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \'Etendre aux fonctions à valeurs vectorielles le théorème fondamental du calcul intégral : l'intégrale d'une fonction est l'accroissement de l'une de ses primitives; voilà le but de cette section. $I$ est un intervalle de $\R$ et les fonctions considérées sont des fonctions continues par morceaux sur $I$ et à valeurs dans $E$, un $\K$-espace vectoriel normé de dimension finie. %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Primitive d'une fonction continue} %--------------------------------------------------------------------- La primitivation est l'opération inverse de la dérivation, ce qui donne la \begin{Df}[Primitive d'une fonction continue]\alaligne Soient $I$ un intervalle et $\vc f$ une fonction \emph{continue} sur $I$; on appelle \emph{primitive de $\vc f$ sur $I$} toute application $\vc F$ de classe $\mcal{C}^1$ sur $I$ telle que : $$ \qqs t\in I,\ \vc F'(t)=\vc f(t) $$ \end{Df} % On étend cette définition aux fonctions continues par morceaux : \begin{Df}[Primitive d'une fonction continue par morceaux]\alaligne Soient $I$ un intervalle et $\vc f$ une fonction \emph{continue par morceaux} sur $I$; on appelle \emph{primitive de $\vc f$ sur $I$} toute application $\vc F$ \emph{continue} et de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux sur $I$ telle qu'en tout point de continuité de $\vc f$, on ait : $\vc F'(t)=\vc f(t)$ \end{Df} \begin{Th}[Unicité]\alaligne Deux primitives sur un \emph{intervalle} d'une même fonction continue par morceaux sont égales à une constante (additive) près. \end{Th} \begin{proof} Soient $\vc F_1$ et $\vc F_2$ deux primitives de $\vc f$ sur $I$. Si $\vc f$ est continue sur $I$, pout tout $t\in I$ $(\vc F_1-\vc F_2)'(t)=\vc F_1'(t)-\vc F_2'(t)=0$, ce qui montre que $\vc F_1-\vc F_2$ est constante sur \emph{l'intervalle} $I$. Si $\vc f$ est continue par morceaux sur $I$, $\vc F_1-\vc F_2$ est \emph{continue} et de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux sur $I$. En tout point de continuité de $\vc f$, $\vc F_1-\vc F_2$ a une dérivée nulle, donc est constante. \end{proof} %-------------------------------------------------- C'est le moment de réviser son tableau de primitives classiques. %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Théorème fondamental du calcul intégral} %--------------------------------------------------------------------- \begin{Lem} Si $\vc f$ est une fonction continue par morceaux qui admet $\vc v$ pour limite à droite en un point $t_0\in I$, la fonction réelle $g$ qui à $h>0$ associe $\sup\ens{\norme{\vc f(u)}}{u\in\intf{t_0}{t_0+h}}$ admet $\norme{\vc v}$ pour limite à droite en $0$. \end{Lem} \begin{proof} Pour $\eps>0$ donné, il existe $\eta>0$ tel que : \begin{equation} u\in\intf{t_0}{t_0+\eta}\implique \norme{\vc f(u)-\vc v}<\eps \end{equation} En utilisant l'inégalité de Minkowski : $\abs[\big]{\norme{\vc f(u)}-\norme{\vc v}} \leq \norme{\vc f(u)-\vc v}$, on obtient : \begin{gather*} u\in\intf{t_0}{t_0+\eta}\implique \norme{\vc v}-\eps<\norme{\vc f(u)}<\norme{\vc v}+\eps \\ \et\qqs h>0,\ h\leq\eta\implique \norme{\vc v}-\eps\leq \sup\ens{\norme{\vc f(u)}}{u\in\intf{t_0}{t_0+h}} \leq\norme{\vc v}+\eps \end{gather*} et $g$ admet $\norme{\vc v}$ pour limite à droite en $0$. \end{proof} %---------------------------------------------------------------------- \begin{Lem} Soient $\vc f$ une fonction continue par morceaux sur un intervalle $I$, $a$ un point de $I$ et $\vc F : t\mapsto\int_{u=a}^t\vc f(u)\,\dt[u]$; alors \begin{prop} \item $\vc F$ est continue sur $I$; \item si $\vc f$ admet une limite à droite en $t_0$ notée $\vc f(t_0+)$, $\vc F$ admet une dérivée à droite en $t_0$ et $\vc F_d'(t_0)=\vc f(t_0+)$; \item si $\vc f$ admet une limite à gauche en $t_0$ notée $\vc f(t_0-)$, $\vc F$ admet une dérivée à gauche en $t_0$ et $\vc F_g'(t_0)=\vc f(t_0-)$. \end{prop} \end{Lem} \begin{proof}\alaligne \begin{demprop} \monitem La continuité sur $I$ équivaut à la continuité sur tout segment de $I$. Soient $S$ un segment de $I$ et $M_S=\sup\ens{\norme{\vc f(t)}}{t\in S}$ ( une fonction continue par morceaux est bornée sur un segment); alors, pour $t_1$ et $t_2$ dans $S$, on obtient : \begin{equation} \norme{\vc F(t_1)-\vc F(t_2)}= \norme[\Big]{\int_{u=t_1}^{t_2} \vc f(u)\,\dt[u]} \leq \abs[\Big]{\int_{u=t_1}^{t_2} \norme{\vc f(u)}\,\dt[u]} \leq \abs{t_2-t_1}M_S \end{equation} et $\vc F$ est lipschitzienne sur $S$ (de rapport $M_S$), donc continue sur $S$. \monitem Soit $h>0$; utilisons le taux d'accroissement de $\vc F$ : \begin{equation} \begin{split} \norme[\Big]{\ra1h\bigl(\vc F(t_0+h) &-\vc F(t_0)\bigr)-\vc f(t_0+)} =\ra1h \norme[\Big]{\int_{u=t_0}^{t_0+h}\vc f(u)\,\dt[u] - \vc f(t_0+)} \\ &=\ra1h \norme[\Big]{\int_{u=t_0}^{t_0+h} \bigl( \vc f(u)-\vc f(t_0+)\bigr)\,\dt[u]} \\ &\leq \sup\ens{\norme{\vc f(u)-\vc f(t_0+)}}{u\in\intf{t_0}{t_0+h}} \tend[\substack{h\to0 \\ h>0}] 0 \end{split} \end{equation} Ainsi, $\dsp \lim_{\substack{h\to0 \\ h>0}} h^{-1}\bigl(\vc F(t_0+h)-\vc F(t_0)\bigr) =\vc f(t_0+)$, \ie{} $\vc F$ est dérivable à droite en $t_0$ et $\vc F'_d(t_0)=\vc f(t_0+)$. \monitem Démonstration analogue. \end{demprop} \end{proof} %-------------------------------------------------- On peut maintenant donner les propriétés de $\vc F : t\in I\mapsto\int_{u=a}^t\vc f(u)\,\dt[u]$ : \begin{Th}[Intégrale dépendant de sa borne supérieure]\alaligne Soient $\vc f$ une fonction définie sur un intervalle $I$, $a$ un point de $I$ et $\vc F$ l'application qui à $t$ associe $\int_{u=a}^t\vc f(u)\,\dt[u]$; \begin{prop} \item si $\vc f$ est continue sur $I$, $\vc F$ est de classe $\mcal{C}^1$ sur $I$ et $\vc F'=\vc f$; \item si $\vc f$ est continue par morceaux sur $I$, $\vc F$ est continue et de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux sur $I$ et $\D\vc F=\vc f$. \end{prop} \end{Th} \begin{proof}\alaligne \begin{demprop} \monitem Le lemme montre qu'en tout point $t_0$ de $I$, $\vc F$ admet une dérivée à droite et une dérivée à gauche égales à $\vc f(t_0)$; $\vc F$ est donc dérivable sur $I$ et sa dérivée $\vc F'=\vc f$ est continue. \monitem Le lemme montre que $\vc F$ est continue sur $I$. Soit $S=\intf cd$ un segment de $I$ tel que $\vc f$ soit continue sur l'intérieur $\into cd$ de $S$ et prolongeable en une fonction continue $\tilde{\vc f}_S$ sur $S$; $\vc F\bigr|_S$ est donc de classe $\mcal{C}^1$ sur l'intérieur de $S$, admet une dérivée à droite en $c$ égale à $\tilde{\vc f}_S(c)$ et une dérivée à gauche en $d$ égale à $\tilde{\vc f}_S(d)$ et la restriction de $\vc F$ à l'intérieur de $S$ se prolonge en une fonction de classe $\mcal{C}^1$ sur $S$. $\vc F$ est donc une fonction de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux sur $I$ dont la dérivée est égale à $\vc f$ en tout point où elle existe, \ie{} $\D\vc F=\vc f$. \end{demprop} \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Primitives et intégrale]\alaligne Si $\vc f$ est une fonction continue (resp. continue par morceaux) sur $I$ et $a$ un point de $I$, \begin{prop} \item $\vc F : t\in I\mapsto\int_{u=a}^t\vc f(u)\,\dt[u]$ est l'unique primitive de $\vc f$ sur $I$ nulle en $a$; \item pour toute primitive $\vc h$ de $\vc f$ sur $I$ et tout $(a,b)\in I^2$, on a $$ \int_a^b\vc f(u)\,\dt[u]=\vc h(b)-\vc h(a) $$ \end{prop} \end{Th} \begin{proof}\alaligne \begin{demprop} \monitem $\vc F$ est une primitive de $\vc f$; si $\vc F_1$ est une autre primitive de $\vc f$ nulle en $a$, $\vc F-\vc F_1$ est nulle en $a$, constante sur $I$, donc nulle sur $I$. \monitem $t\mapsto \vc h(t)-\vc h(a)$ est une primitive de $\vc f$ sur $I$ nulle en $a$, donc égale à $\vc F$. \end{demprop} \end{proof} %-------------------------------------------------- %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Applications} %--------------------------------------------------------------------- %-------------------------------------------------- \subsubsection{Accroissement et intégrale} %-------------------------------------------------- Si $\vc f$ est une fonction de classe $\mcal{C}^1$ sur $I$, $\vc f$ est une primitive de la fonction continue $\vc f'$. De même, si $\vc f$ est une fonction \emph{continue} de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux sur $I$, $\vc f$ est toujours une primitive de la fonction $\D\vc f$ continue par morceaux sur $I$. On a donc le \begin{Th} Si $\vc f$ est de classe $\mcal{C}^1$ (resp. continue et de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux) sur $I$, on a : \Reponse{$\dsp \qqs(a,b)\in I^2,\ \vc f(b)-\vc f(a)=\int_{t=a}^b\vc f'(t)\,\dt $} \end{Th} %-------------------------------------------------- \subsubsection{Primitives $T$-périodiques d'une fonction $T$-périodique} %-------------------------------------------------- À quelles conditions les primitives d'une fonction $T$-périodique sont-elles $T$-périodiques? La proposition suivante répond à cette question. \begin{Prop} Si $\vc f$ est une fonction continue (resp. continue par morceaux) sur $\R$ et de période $T$, les propositions suivantes sont équivalentes : \begin{prop} \item toutes les primitives de $\vc f$ sont périodiques; \item $\vc F : t\in I\mapsto\int_{u=a}^t\vc f(u)\,\dt[u]$ est $T$-périodique; \item $\int_{u=0}^T\vc f(u)\,\dt[u]=\vc 0$. \end{prop} \end{Prop} \begin{proof}\alaligne\\ $i.\implique ii.$ $\vc F$ est une primitive particulière.\\ $ii.\implique iii.$ $\vc F(T)=\vc F(0)$, \ie{} $\int_{\intf0T}\vc f=\vc 0$.\\ $iii.\implique i.$ Soit $\vc h$ une primitive de $\vc f$; posons $\vc H(t)=\vc h(t+T)-\vc h(t)$; $\vc H$ est une fonction de classe $\mcal{C}^1$ (resp. continue et de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux) sur $\R$, et : \begin{equation}\label{e\DP period} \vc H'(t)=\vc h'(t+T)-\vc h'(t)=\vc f(t+T)-\vc f(t)=\vc 0 \end{equation} pour tout $t\in\R$ (resp. en tout point de continuité de $\vc f$); ceci implique que $\vc H$ est une fonction constante égale à $\vc H(0)=\vc h(T)-\vc h(0)=\int_{\intf0T}\vc f=\vc 0$. Ainsi $\vc H$ est la fonction nulle et $\vc h$ est périodique de période $T$. \end{proof} \begin{Prop}[Intégrale d'une fonction périodique sur une période]\alaligne L'intégrale d'une fonction continue (resp. continue par morceaux) et périodique sur $\R$ est indépendante de la période choisie. En particulier, si $\vc f$ est $T$-périodique, on a les relations : \Reponse{$\dsp \qqs(a,b)\in\R^2,\ \int_a^{a+T}\vc f=\int_b^{b+T}\vc f\quad\et\quad \int_a^b\vc f=\int_{a+T}^{b+T}\vc f $} \end{Prop} \begin{proof} Soit $\vc h$ une primitive de $\vc f$ sur $\R$ et posons $\vc H(t)=\int_{u=t}^{t+T}\vc f(u)\,\dt[u]=\vc h(t+T)-\vc h(t)$; la relation \eqref{e\DP period} montre $\vc H$ est une fonction constante et donc $\vc H(a)=\vc H(b)$. Par application de la relation de Chasles, on obtient : \begin{equation} \int_{a+T}^{b+T}\vc f=-\int_a^{a+T}\vc f+\int_a^b\vc f+\int_b^{b+T}\vc f =\int_a^b\vc f \end{equation} \end{proof} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \section{Calcul intégral} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Formule d'intégration par parties} %--------------------------------------------------------------------- \begin{Th}[Cas des fonctions de classe $\mcal{C}^1$]\alaligne Si $\vc f$ est une fonction vectorielle et $\vphi$ une fonction numérique de classe $\mcal{C}^1$ sur $I$, on a pour tout $a$ et $b$ dans $I$ : \Reponse{$\dsp \int_{t=a}^b \vphi(t)\vc f'(t)\,\dt= \vphi(b)\vc f(b)-\vphi(a)\vc f(a)-\int_{t=a}^b \vphi'(t)\vc f(t)\,\dt $} \Reponse{$\dsp \int_{t=a}^b \vphi'(t)\vc f(t)\,\dt= \vphi(b)\vc f(b)-\vphi(a)\vc f(a)-\int_{t=a}^b \vphi(t)\vc f'(t)\,\dt $} \end{Th} \begin{proof} De $(\vphi\,\vc f)'=\vphi\,\vc f'+\vphi'\vc f$, on tire $\vphi\,\vc f'=(\vphi\,\vc f)'-\vphi'\vc f$, ce qui donne le résultat par intégration. La démonstration est analogue pour la seconde formule. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Cas des fonctions continues et $\mcal{C}^1$ par morceaux]\alaligne La formule d'intégration par parties est encore valable pour les fonctions \emph{continues} et de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux sur $I$. \end{Th} \begin{proof} $\vc f\vphi$ est une fonction continue et $\mcal{C}^1$ par morceaux sur $I$; en dehors d'une partie finie du segment $S$ d'extrémités $a$ et $b$, on peut écrire : $$ (\vphi\,\vc f)'(t)=\vphi(t)\vc f'(t)+\vphi'(t)\vc f(t)\et \vphi(t)\vc f'(t)=(\vphi\,\vc f)'(t)-\vphi'(t)\vc f(t) $$ ce qui donne le résultat par intégration. On a une formule analogue pour l'intégration par parties de $\int_{t=a}^b\vphi'(t)\vc f(t)\,\dt$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Prop}[Formule d'intégration par parties itérée]\alaligne Si $\vc f$ est une fonction vectorielle et $\vphi$ une fonction numérique de classe $\mcal{C}^k$ (resp. de classe $\mcal{C}^{k-1}$ et de classe $\mcal{C}^{k}$ par morceaux) sur $I$, on a pour tout $a$ et $b$ dans $I$ : $$ \int_a^b \vphi\,\vc f^{(k)}= \biggl[\sum_{p=0}^{k-1} (-1)^p \vphi^{(p)}(t)\vc f^{(k-1-p)}(t)\biggr]_{t=a}^{t=b} +(-1)^k\int_a^b \vphi^{(k)}\vc f $$ \end{Prop} \begin{proof} Démonstration par récurrence sur $k$.\\ Le cas $k=1$ est la formule habituelle d'intégration par parties.\\ La propriété est hériditaire grâce au calcul suivant : \begin{multline*} \int_a^b \vphi\,\vc f^{(k+1)} =\vphi(t)\vc f^{(k)}(t)\Bigr]_{t=a}^{t=b}-\int_a^b \vphi'\vc f^{(k)} \\ =\vphi(t)\vc f^{(k)}(t)\Bigr]_{t=a}^{t=b}- \Bigl[\sum_{p=0}^{k-1}(-1)^p {\vphi'}^{(p)}(t)\vc f^{(k-1-p)}(t)\Bigr]_{t=a}^{t=b} -(-1)^k\int_a^b {\vphi'}^{(k)}\vc f \\ =\Bigl[\vphi(t)\vc f^{(k)}(t)+ \sum_{p=0}^{k-1} (-1)^{p+1} \vphi^{(p+1)}(t)\vc f^{\bigl(k-(p+1)\bigr)}(t) \Big]_{t=a}^{t=b} +(-1)^{k+1}\int_a^b \vphi^{(k+1)}\vc f \\ =\Bigl[\vphi(t)\vc f^{(k)}(t)+ \sum_{q=1}^{k} (-1)^{q} \vphi^{(q)}(t)\vc f^{(k-q)}(t) \Bigr]_{t=a}^{t=b} +(-1)^{k+1}\int_a^b \vphi^{(k+1)}\vc f \end{multline*} \end{proof} %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Changement de variable} %--------------------------------------------------------------------- %-------------------------------------------------- \subsubsection{Cas des fonctions continues} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Formule de changement de variable]\alaligne Si $\vc f$ est une fonction continue sur $I$ à valeurs dans $E$ et $\vphi$ une fonction de classe $\mcal{C}^1$ sur $\intf\alpha\beta$ à valeurs dans $I$, on a : \Reponse{$\dsp \int_{t=\vphi(\alpha)}^{\vphi(\beta)}\vc f(t)\,\dt= \int_{u=\alpha}^\beta \vc f\bigl(\vphi(u)\bigr)\vphi'(u)\,\dt[u] $} \end{Th} \begin{proof} Soit $\vc F$ une primitive de $\vc f$ (continue) sur $I$; $\vc F$ est $\mcal{C}^1$ sur $I$, $\vc F\circ\vphi$ est $\mcal{C}^1$ sur $\intf\alpha\beta$ par composition et $(\vc F\circ\vphi)'=\vc F'\circ\vphi\,\vphi'=\vc f\circ\vphi\,\vphi'$, ce qui montre que $\vc F\circ\vphi$ est une primitive de $\vc f\circ\vphi\,\vphi'$. Ainsi : \begin{equation} \int_{u=\alpha}^\beta \vc f\bigl(\vphi(u)\bigr)\vphi'(u)\,\dt[u]= \vc F\circ\vphi(u)\Big]_{u=\alpha}^{u=\beta}= \vc F\bigl(\vphi(\alpha)\bigr)-\vc F\bigl(\vphi(\beta)\bigr)= \int_{t=\vphi(\alpha)}^{\vphi(\beta)}\vc f(t)\,\dt \end{equation} \end{proof} %-------------------------------------------------- %-------------------------------------------------- \subsubsection{Cas des fonctions continues par morceaux} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Cas des fonctions continues par morceaux]\alaligne Si $\vc f$ est une fonction continue par morceaux sur $I$ à valeurs dans $E$ et $\vphi$ une fonction de classe $\mcal{C}^1$ sur $\intf\alpha\beta$ à valeurs dans $I$ et strictement monotone, on a : \Reponse{$\dsp \int_{t=\vphi(\alpha)}^{\vphi(\beta)}\vc f(t)\,\dt= \int_{u=\alpha}^\beta \vc f\bigl(\vphi(u)\bigr)\vphi'(u)\,\dt[u] $} \end{Th} \begin{proof} Soit $\vc F$ une primitive de $\vc f$ (continue par morceaux) sur $I$; $\vc F$ est continue et $\mcal{C}^1$ par morceaux sur $I$, donc de classe $\mcal{C}^1$ sur le segment $\intf{\vphi(\alpha)}{\vphi(\beta)}$ privé d'une partie finie $\sigma$; $\vc F\circ\vphi$ est donc continue sur $\intf\alpha\beta$ et de classe $\mcal{C}^1$ en dehors de la partie finie $\vphi^{<-1>}(\sigma)$ (la partie est finie puisque $\vphi$ est strictement monotone) et en dehors de cette partie finie, $(\vc F\circ\vphi)'=\vc F'\circ\vphi\,\vphi'=\vc f\circ\vphi\,\vphi'$, ce qui montre que $\vc F\circ\vphi$ est une primitive de $\vc f\circ\vphi\,\vphi'$, et\dots Ainsi : \begin{equation*} \int_{u=\alpha}^\beta \vc f\bigl(\vphi(u)\bigr)\vphi'(u)\,\dt[u]= \vc F\circ\vphi(u)\Big]_{u=\alpha}^{u=\beta}= \vc F\bigl(\vphi(\alpha)\bigr)-\vc F\bigl(\vphi(\beta)\bigr)= \int_{t=\vphi(\alpha)}^{\vphi(\beta)}\vc f(t)\,\dt \end{equation*} \end{proof} %-------------------------------------------------- %-------------------------------------------------- \subsubsection{En pratique}\alaligne %-------------------------------------------------- S'il s'agit de calculer une intégrale de la forme $\int_{u=\alpha}^\beta \vc f\bigl(\vphi(u)\bigr)\vphi'(u)\,\dt[u]$, posez $t=\vphi(u)$, calculez formellement la différentielle $\dt=\vphi'(u)\,\dt[u]$, remplacez les bornes par $\vphi(\alpha)$ et $\vphi(\beta)$ et servez chaud! S'il s'agit de transformer l'intégrale $\int_{t=a}^b\vc f(t)\,\dt$ à l'aide d'une fonction strictement monotone $\vphi$, posez $t=\vphi(u)$, calculez la différentielle $\dt=\vphi'(u)\,\dt[u]$ et remplacez les bornes $a$ et $b$ par $\vphi^{-1}(a)$ et $\vphi^{-1}(b)$. Voilà la grande force des notations de Leibniz qui ont permis l'essor du calcul différentiel et intégral vers la fin du XVII\ieme{} siècle. %-------------------------------------------------- \subsubsection{Applications}\alaligne %-------------------------------------------------- Si $\vc f$ est continue par morceaux sur le segment $\intf{-a}a$ avec $a>0$, \Reponse{$\dsp \int_{t=-a}^a \vc f(t)\,\dt=\int_{u=0}^a\bigl(\vc f(u)+\vc f(-u)\bigr)\,\dt[u]= \begin{cases} 2\int_{u=0}^a\vc f(u)\,\dt[u] & \text{si $\vc f$ est paire} \\ \vc 0 & \text{si $\vc f$ est impaire} \end{cases} $} Si $\vc f$ est continue par morceaux sur le segment $\intf ab$, en utilisant le changement de variable $t=a+(b-a)u$ ou $t=\ra{b+a}2 +\ra{b-a}2 v$, \Reponse{$\dsp \int_{t=a}^b\vc f(t)\,\dt=(b-a)\int_{u=0}^1 \vc f\bigl(a+(b-a)u\bigr)\,\dt[u] =\ra{b-a}2 \int_{v=-1}^1 \vc f\biggl(\ra{b+a}2 + \ra{b-a}2 v\biggr)\,\dt[v] $} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \section{Accroissements finis} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Cas des fonctions réelles} %--------------------------------------------------------------------- Quelques rappels de première année concernant les fonctions réelles. \begin{Th}[Théorème de Rolle]\alaligne Si $f$ est une fonction à valeurs \emph{réelles}, continue sur le segment $\intf ab$, dérivable sur l'intervalle ouvert $\into ab$ et telle que $f(a)=f(b)$, il existe $c\in\into ab$ avec $$ f'(c)=0 $$ \end{Th} \begin{Th}[Théorème de Rolle, généralisation]\alaligne Si $f$ est une fonction à valeurs \emph{réelles}, continue sur l'intervalle $\intf a{+\infty}$, dérivable sur l'intervalle ouvert $\into a{+\infty}$ et telle que $\lim_{t\uparrow +\infty} f(t)=f(a)$, il existe $c\in\into a{+\infty}$ avec $$ f'(c)=0 $$ \end{Th} \begin{proof} On pose $u=\exp(-t)$, soit $t=-\ln u$ et $u\mapsto f(-\ln u)$ se prolonge en une fonction continue sur le segment $\intf{0}{\exp(-a)}$. Le théorème (habituel) de Rolle permet de conclure. \end{proof} %---------------------------------------------------------------------- \begin{Th}[\'Egalité des accroissements finis]\alaligne Si $f$ est une fonction à valeurs \emph{réelles}, continue sur le segment $\intf ab$ et dérivable sur l'intervalle ouvert $\into ab$, il existe $c\in\into ab$ avec $$ f'(c)=\ra{f(b)-f(a)}{b-a} $$ \end{Th} \begin{Th}[Inégalité des accroissements finis]\alaligne Si $f$ est une fonction à valeurs \emph{réelles}, continue sur le segment $\intf ab$, dérivable sur l'intervalle ouvert $\into ab$ telle qu'il existe $m$ et $M$ vérifiant $m\leq f'(t)\leq M$ pour tout $t\in \into ab$, alors $$ m\leq \ra{f(b)-f(a)}{b-a}\leq M $$ \end{Th} \begin{NB} Le théorème de Rolle et l'égalité des accroissements finis tombent en défaut si les fonctions sont à valeurs complexes ou vectorielles; $t\mapsto\exp(it)$ fournit un contre-exemple sur le segment $\intf 0{2\pi}$. \end{NB} %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Inégalité des accroissements finis} %--------------------------------------------------------------------- Rappelons la relation fondamentale qui lit une fonction et sa dérivée : si $\vc f$ est une fonction continue et de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux sur $I$, $$ \qqs(u,v)\in I^2,\ \vc f(v)-\vc f(u)=\int_{t=u}^v \vc f'(t)\,\dt $$ Une majoration de $\norme{\vc f'(t)}$ donne une majoration de l'accroissement de $\vc f$. Considérons le cas des fonctions de classe $\mcal{C}^1$. \begin{Th}[Inégalité des accroissements finis]\alaligne Si $\vc f$ est une fonction continue sur le segment $\intf ab$, de classe $\mcal{C}^1$ sur l'intervalle ouvert $\into ab$, et si $\lambda$ est un nombre positif vérifiant $\norme{\vc f'(t)}\leq\lambda$ pour tout $t\in\into ab$, alors $$ \norme{\vc f(b)-\vc f(a)}\leq\lambda(b-a) $$ \end{Th} \begin{proof} Soient $u$ et $v$ deux points de $\into ab$ avec $u<v$; on a : \begin{equation} \norme{\vc f(u)-\vc f(v)}=\norme[\Big]{\int_{t=u}^v\vc f'(t)\,\dt}\leq \int_{t=u}^v\norme{\vc f'(t)}\,\dt\leq\int_{t=u}^v\lambda\,\dt=(v-u)\lambda \end{equation} Un passage à la limite pour $u\downarrow a$ et $v\uparrow b$ donne l'inégalité annoncée, puisque les limites existent. \end{proof} %---------------------------------------------------------------------- Une fonction peut être continue sur $\intf ab$ et de classe $\mcal{C}^1$ sur $\into ab$ sans être de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux, $t\mapsto t\sin(t^{-1})$ en est un exemple. Envisageons maintenant le cas des fonctions continues et de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux. \begin{Th}[Inégalité des accroissements finis]\alaligne Si $\vc f$ est une fonction continue et de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux sur l'intervalle $I$, et $\lambda>0$ un majorant de $\norme{\vc f'(t)}$ en tout point où la dérivée existe, alors \Reponse{$\dsp \qqs(a,b)\in I^2,\ \norme{\vc f(b)-\vc f(a)}\leq\lambda(b-a) $} \end{Th} \begin{proof} Soit $(a_i)_{0\leq i\leq n}$ une subdivision du segment $\intf ab$ subordonnée à $\vc f$. En utilisant l'inégalité des accroissements finis sur $\intf{a_{i-1}}{a_i}$, on obtient : \begin{equation} \qqs i\in\Intf1n,\ \norme{\vc f(a_i)-\vc f(a_{i-1}}\leq\lambda(a_i-a_{i-1}) \end{equation} En sommant ce inégalités et utilisant l'inégalité triangulaire, on obtient le résultat demandé. \end{proof} %---------------------------------------------------------------------- %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Prologement des fonctions de classe $\mcal{C}^k$} %--------------------------------------------------------------------- \begin{Th}[Prolongement des fonctions de classe $\mcal{C}^1$]\alaligne Si $\vc f$ est une fonction continue sur le segment $\intf ab$, de classe $\mcal{C}^1$ sur l'intervalle $\intof ab$, telle que $\vc f'$ admet une limite (finie) en $a$, $\vc f$ est de classe $\mcal{C}^1$ sur le segment $\intf ab$. \end{Th} \begin{proof} Les hypothèses sur $\vc f$ montrent que $\vc f$ est une fonction continue et de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux sur $\intf ab$. Appelons $\vc g$ le prolongement par continuité de $\vc f'$ sur $\intf ab$. On peut écrire : \begin{equation} \vc f(t)=\vc f(a)+\int_{u=a}^t\vc f'(u)\,\dt[u]=\vc f(a)+\int_{u=a}^t\vc g(u)\,\dt[u] \end{equation} ce qui montre que $\vc f$ est de classe $\mcal{C}^1$ sur $\intf ab$, puisque $\vc g$ est continue sur $\intf ab$, et $\vc f'(a)=\vc g(a)=\lim_{t\downarrow a}\vc f'(t)$ \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Prolongement des fonctions de classe $\mcal{C}^k$]\alaligne Si $\vc f$ est une fonction continue sur le segment $\intf ab$ et de classe $\mcal{C}^k$ sur l'intervalle $\intof ab$, et si, pour tout $r\in\Intf1k$, $\vc \D^r \vc f$ admet une limite (finie) en $a$, $\vc f$ est de classe $\mcal{C}^k$ sur le segment $\intf ab$. \end{Th} \begin{proof} La démonstration s'effectue à l'aide d'une récurrence sur $k$, le cas $k=1$ venant d'être démontré. Si $\vc f$ est une fonction continue sur $\intf ab$ et de classe $\mcal{C}^{k+1}$ sur $\intof ab$, et si $\D^r\vc f$ admet une limite en $a$ pour tout $r\in\Intf1{k+1}$, $\vc f$ vérifie les hypothèses du théorème au rang $k$, et, par hypothése de récurrence, $\vc f$ est une fonction de classe $\mcal{C}^k$ sur $\intf ab$. On peut donc affirmer que $\D^k\vc f=\vc f^{(k)}$ vérifie les hypothèses du théorème au rang 1, ce qui montre que $\D^k\vc f$ est de classe $\mcal{C}^1$, et donc $\vc f$ est de classe $\mcal{C}^{k+1}$ sur le segment $\intf ab$. \end{proof} %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Caractérisation des fonctions de classe $\mcal{C}^k$ par morceaux sur un segment} %--------------------------------------------------------------------- \begin{Th} $\vc f$ est une fonction de classe $\mcal{C}^k$ par morceaux sur le segment $\intf ab$ si, et seulement si, il existe une subdivision $(a_i)_{0\leq i\leq n}$ subordonnée à $\vc f$ telle que $\vc f$ soit de classe $\mcal{C}^k$ sur $\into{a_{i-1}}{a_i}$ pour tout $i\in\Intf1n$, et $\D^r\vc f$ admette une limite à droite en $a_{i-1}$ et une limite à gauche en $a_i$ pour tout $r\in\Intf0k$. \end{Th} \begin{proof} Seule la condition suffisante mérite une démonstration, puisque, par définition d'une fonction de classe $\mcal{C}^k$ par morceaux, la restriction de $\D^r\vc f$ à $\into{a_{i-1}}{a_i}$ se prolonge en une fonction continue sur $\intf{a_{i-1}}{a_i}$, pour tout $i\in\Intf1n$.\\ % \CS Par hypothèse, la restriction de $\vc f$ à $\into{a_{i-1}}{a_i}$ se prolonge en une fonction $\tilde{\vc f}_i$ continue sur $\intf{a_{i-1}}{a_i}$. La fonction $\tilde{\vc f}_i$ vérifie sur $\intf{a_{i-1}}{a_i}$ les hypothèses du théorème de prolongement des fonctions de classe $\mcal{C}^k$. \end{proof} %-------------------------------------------------- %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \section{Formules de Taylor} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% %--------------------------------------------------------------------- \subsection{\'Egalité de Taylor à l'ordre $k$} %-------------------------------------------------------------------- \begin{Th}[Formule de Taylor à l'ordre $k$, reste intégral]\alaligne Pour une application $\vc f$ de classe $\mcal{C}^k$ sur $I$ et de classe $\mcal{C}^{k+1}$ par morceaux sur $I$, on a la \emph{formule de Taylor à l'ordre $k$ avec reste intégral} \Reponse{$\dsp \qqs(a,t)\in I^2,\ \vc f(t)=\vc f(a)+ \sum_{r=1}^k\ra{(t-a)^r}{r!}\D^r\vc f(a)+\vc R_k(t)$ \\ $\dps\text{avec } \vc R_k(t)=\int_{u=a}^t\ra{(t-u)^k}{k!}\D^{k+1}\vc f(u)\,\dt[u] =(t-a)^{k+1}\int_{v=0}^1\ra{(1-v)^k}{k!}\D^{k+1}\vc f\bigl(a+(t-a)v\bigr)\,\dt[v] $} \end{Th} \begin{proof} Utilisation de la formule d'intégration par parties itérée appliquée aux fonctions $\vc f$ et $\vphi(u)=\ra{(t-u)^k}{k!}$; pour tout $p\in\Intf0k$, $\vphi^{(p)}(u)=(-1)^p \ra{(t-u)^{k-p}}{(k-p)!}$, $\vphi^{(k+1)}(u)=0$ et : \begin{multline} \vc R_k(t) =\int_{u=a}^t\ra{(t-u)^k}{k!}\D^{k+1}\vc f(u)\,\dt[u] =\Bigl[\sum_{p=0}^k\ra{(t-u)^{k-p}}{(k-p)!}\vc f^{(k-p)}(u) \Bigr]_{u=a}^{u=t}+\vc 0 \\ =\sum_{p=0}^{k-1}-\ra{(t-a)^{k-p}}{(k-p)!}\vc f^{(k-p)}(a) +\vc f(t)-\vc f(a) \end{multline} ce qui donne la formule annoncée en posant $r=k-p$. Le changement de variable $u=a+(t-a)v\iff v=\ra{u-a}{t-a}$ permet de passer de l'intervalle \og variable\fg{}, \ie{} dépendant de $t$, $\intf at$ à l'intervalle \og fixe\fg{} $\intf01$, et donne la seconde expression du reste. \end{proof} %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Majoration du reste} %--------------------------------------------------------------------- \begin{Th}[Inégalité de Taylor à l'ordre $k$]\alaligne Pour une application $\vc f$ de classe $\mcal{C}^k$ sur $I$ et de classe $\mcal{C}^{k+1}$ par morceaux sur $I$ telle qu'il existe un majorant $M_{k+1}$ de $\norme{\D^{k+1}\vc f(u)}$ en tout point $u$ où la dérivée d'ordre $k+1$ existe, on a \emph{l'inégalité de Taylor à l'ordre $k$} : \Reponse{$\dsp \qqs(a,t)\in I^2,\ \norme[\Big]{\vc f(t)-\sum_{r=0}^k\ra{(t-a)^r}{r!}\D^r\vc f(a)}\leq \ra{\abs{t-a}^{k+1}}{(k+1)!}M_{k+1} $} \end{Th} \begin{proof} On a la majoration suivante du reste $\vc R_k$ : \begin{equation} \begin{split} \norme{\vc R_k(t)} &=\abs{t-a}^{k+1} \norme[\Big]{\int_{v=0}^1\ra{(1-v)^k}{k!}\D^{k+1}\vc f\bigl(a+(t-a)v\bigr)\,\dt[v]}\\ &\leq\abs{t-a}^{k+1} \int_{v=0}^1\ra{(1-v)^k}{k!}\norme[\big]{\D^{k+1}\vc f\bigl(a+(t-a)v\bigr)}\,\dt[v]\\ &\leq\ra{\abs{t-a}^{k+1}}{k!}\int_{v=0}^1 (1-v)^k M_{k+1}\,\dt[v] =\ra{\abs{t-a}^{k+1}}{k!}\ra{M_{k+1}}{k+1} \end{split} \end{equation} \end{proof} %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Formule de Taylor-Young} %--------------------------------------------------------------------- %-------------------------------------------------- \subsubsection{Développement limité d'une primitive} %-------------------------------------------------- \begin{Th}\mbox{} Si $\vc f$ est une fonction continue qui admet un développement limité à l'ordre $k$ au voisinage d'un point $t_0$ de $I$, toute primitive $\vc F$ de $\vc f$ admet un développement limité à l'ordre $k+1$ au voisinage de $t_0$; plus précisément, \Reponse{$\dsp \vc f(t_0+h)=\sum_{p=0}^k h^p\vc a_p+\oo{h^k}\implique \vc F(t_0+h)=\vc F(t_0)+\sum_{p=0}^k\ra{h^{p+1}}{p+1}\vc a_p +\oo{h^{k+1}} $} \end{Th} \begin{proof} La fonction $t\mapsto \beps(t_0+h)=h^{-k}\bigl(\vc f(t_0+h) -\sum_{p=0}^kh^p\vc a_p\bigr)$ se prolonge en une fonction continue sur $I$ ($\beps(t_0)=\vc 0$); par conséquent, $\sup_{t\in\intf{t_0}{t_0+h}}\norme{\beps(t)}$ admet 0 pour limite quand $h$ tend vers 0. On peut écrire : \begin{multline} \ra1{\abs{h^k}} \norme[\Big]{\vc F(t_0+h)-\vc F(t_0)-\sum_{p=0}^k\ra{h^{p+1}}{p+1}\vc a_p} \\ =\ra1{\abs{h^k}} \norme[\Big]{\int_{u=0}^h\Bigl(\vc f(t_0+u)-\sum_{p=0}^k(u)^p\vc a_p\Bigr)\,\dt[u]} =\ra1{\abs{h^k}}\norme[\Big]{\int_{u=0}^h u^k\beps(t_0+u)\,\dt[u]} \\ \leq\ra1{\abs{h^k}} \abs[\Big]{\int_{u=0}^h u^k\,\dt[u]}\sup_{u\in\intf0h}\norme{\beps(t_0+u)} =\ra1{k+1}\sup_{t\in\intf{t_0}{t_0+h}}\norme{\beps(t)}\tend[h\to0]0 \end{multline} \end{proof} %---------------------------------------------------------------------- %-------------------------------------------------- \subsubsection{Développement limité de la dérivée d'une fonction $\mcal{C}^1$} %-------------------------------------------------- \begin{Th} Une fonction de classe $\mcal{C}^1$, dont la dérivée admet un développement limité à l'ordre k, admet un développement limité à l'ordre $k+1$ et le développement limité de la dérivée est la dérivée terme à terme du développement limité de la fonction; plus précisément : $$ \vc f(t_0+h)=\vc f(t_0)+ \sum_{p=0}^k \vc a_p h^{p+1}+\oo{h^{k+1}} \implique \vc f'(t_0+h)=\sum_{p=0}^k(p+1)\vc a_{p+1}h^p+\oo{h^k} $$ \end{Th} \begin{proof} $\vc f$ est une primitive de $\vc f'$ et on applique le théorème précédent \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{NB} Attention ! Il faut supposer l'existence du développement limité de $\vc f'$ sinon le théorème est mis en défaut : $f(t)=t^3\sin \ra1t=\oo{t^2}$ admet un développement limité à l'ordre 2, tandis que sa dérivée n'admet un développement limité qu'à l'ordre 0. \end{NB} %-------------------------------------------------- \subsubsection{Existence d'un développement limité à l'ordre $k$ pour une fonction $\mcal{C}^k$} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Formule de Taylor-Young]\alaligne Toute fonction de classe $\mcal{C}^k$ sur~$I$ admet un développement limité à l'ordre $k$ en tout point de $I$, à savoir : \Reponse{$\dsp \vc f(t_0+h)=\vc f(t_0)+\sum_{p=1}^k\ra{h^p}{p!}\vc f^{(p)}(t_0)+\oo{h^k} $} \end{Th} \begin{proof} La démonstration se fait par récurrence sur $k$, le cas $k=1$ ayant déjà été traité (la dérivation équivaut à l'existence d'un développement limité à l'ordre~1). Si $\vc f$ est de classe $\mcal{C}^{k+1}$, $\vc f'$ est de classe $\mcal{C}^k$ et admet, grâce à l'hypothèse de récurrence, un développement limité à l'ordre $k$ : \begin{equation} %\begin{split} \vc f'(t_0+h) =\vc f'(t_0)+\sum_{p=1}^k\ra{h^p}{p!}\D^p\vc f'(t_0)+\oo{h^k}% \\ =\sum_{p=0}^k \ra{h^p}{p!} \vc f^{(p+1)}(t_0)+\oo{h^k} %\end{split} \end{equation} et par intégration : \begin{equation} \vc f(t)-\vc f(t_0)=\sum_{p=0}^k\ra{h^{p+1}}{(p+1)!}f^{(p+1)}(t_0) +\oo{h^{k+1}} \end{equation} \end{proof} %---------------------------------------------------------------------- %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \section{Suites et séries de fonctions de classe $\mcal{C}^k$} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% Si $(f_n)_n$ est une suite de fonctions numériques qui converge simplement vers une fonction $f$ sur l'intervalle $I$, à quelles conditions peut-on affirmer que la limite $f$ est dérivable, de classe $\mcal{C}^1$, de classe $\mcal{C}^k$, de classe $\mcal{C}^\infty$ ? Les mêmes questions seront posées pour l'étude des séries de fonctions. Prenons, par exemple, $f_n : t\mapsto\sqrt{t^2+\ra1{n+1}}$. Les fontions $f_n$ sont des fonctions de classe $\mcal{C}^\infty$ sur $\R$; la suite $(f_n)_n$ converge uniformément vers $f : t\mapsto\abs{t}$ sur $\R$, puisque : $$ 0<f_n(t)-f(t)=\sqrt{t^2+\ra1{n+1}}-\abs{t}= \ra{\ra1{n+1}}{\sqrt{t^2+\ra1{n+1}}+\abs{t}} \leq\ra{\ra1{n+1}}{\sqrt{\ra1{n+1}}}=\ra1{\sqrt{n+1}} $$ et $\normi{f_n-f}\leq\ra1{\sqrt{n+1}}$; or la limite $f$ n'est pas dérivable sur $\R$ ($f$ n'est pas dérivable en $t=0$). Ceci montre l'\emph{insuffisance} de la convergence uniforme de $(f_n)_n$ vers $f$ pour affirmer la dérivabilité de $f$. Dans cette section, les fonctions considérées sont définies sur un intervalle $I$ de $\R$ et à valeurs réelles ou complexes. %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Dérivation de la limite d'une suite de fonctions} %--------------------------------------------------------------------- \begin{Lem} Si $(h_n)_n$ est une suite de fonctions numériques continues qui converge uniformément sur tout segment de l'intervalle $I$ vers une fonction (continue) $h$, la suite $(H_n)_n$ des primitives de $h_n$ nulles en un point $a$ de $I$ converge uniformément sur tout segment de $I$ vers la primitive $H$ de $h$ nulle en $a$. \end{Lem} \begin{proof} La continuité des $h_n$ et la convergence uniforme sur tous les segments de $I$ de $(h_n)_n$ vers $h$ montrent la continuité de $h$. Soient $S$ un segment (quelconque) de $I$ et $K=\intf cd$ un segment de $I$ qui contient $S$ et $a$; alors, pour tout $t\in S$, \begin{multline} \abs{H_n(t)-H(t)}=\Bigl|\int_{u=a}^t \bigl(h_n(u)-h(u)\bigr)\,\dt[u] \Bigr| \leq\Bigl|\int_{u=a}^t \bigl|h_n(u)-h(u)\bigr|\,\dt[u] \Bigr| \\ \leq\abs{t-a}\sup_{u\in K}\bigl|h_n(u)-h(u)\bigr| \leq(d-c)\norme{h_n-h}_{\infty,K} \end{multline} Ainsi, $\norme{H_n-H}_{\infty,S}\leq(d-c)\norme{h_n-h}_{\infty,K}\tend 0$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Dérivation de la limite]\alaligne Si $(f_n)_n$ est une suite de fonctions numériques de classe $\mcal{C}^1$ sur $I$ qui converge simplement sur $I$ vers $f$, et si la suite $(f'_n)_n$ des dérivées converge uniformément sur tout segment de $I$ vers $g$, $f$ est de classe $\mcal{C}^1$ sur $I$ et $f'=g$, \ie $$ \qqs t\in I,\ \ra d{dt}\Bigl(\lim_n f_n(t)\Bigr) =\lim_n\ra d{dt}\Bigl(f_n(t)\bigr)\Bigr) $$ \end{Th} \begin{proof} Pour tout $t\in I$, $f_n(t)=f_n(a)+\int_{u=a}^t f'_n(u)\,\dt[u]$; un passage à la limite sur $n$ donne : \begin{equation} \qqs t\in I,\ f(t)=f(a)+\int_{u=a}^t g(u)\,\dt[u] \end{equation} ce qui montre que $f$ est de classe $\mcal{C}^1$ sur $I$ et $f'=g$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{NB} Si $S$ et $K=\intf cd$ sont des segments de $I$ tels que $K$ contienne $S$ et $a$, les inégaltés pour tout $t\in S$ \begin{equation} \begin{split} \bigl|f_n(t)-f(t)\bigr| &=\Bigl|f_n(a)-f(a)+\int_{u=a}^t\bigl(f'_n(u)-g(u)\bigr)\,\dt[u]\Bigr| \\ &\leq\bigl|f_n(a)-f(a)\bigr|+ \Bigl|\int_{u=a}^t\bigl(f'_n(u)-g(u)\bigr)\,\dt[u]\Bigr| \\ &\leq|\bigl|f_n(a)-f(a)\bigr|+ \Bigl|\int_{u=a}^t\bigl|f'_n(u)-g(u)\bigr|\,\dt[u]\Bigr| \\ &\leq\bigl|f_n(a)-f(a)\bigr|+\abs{t-a}\,\norme{f'_n-g}_{\infty,K} \\ &\leq\bigl|f_n(a)-f(a)\bigr|+(d-c)\norme{f'_n-g}_{\infty,K} \end{split} \end{equation} donnent : $$ \norme{f_n-f}_{\infty,S}\leq \abs{f_n(a)-f(a)}+(d-c)\norme{f'_n-g}_{\infty,K} $$ et montrent la convergence uniforme sur tout segment de $I$ de la suite $(f_n)_n$ vers $f$. \end{NB} \begin{Th}[Extension aux fonctions de classe $\mcal{C}^k$]\alaligne Si ${(f_n)}_n$ est une suite de fontions de classe $\mcal{C}^k$ sur $I$, si, pour tout $r\in\Intf0{k-1}$, la suite $(\D^r f_n)_n$ des dérivées d'ordre $r$ converge simplement sur $I$ vers $g_r$, si la suite $(\D^k f_n)_n$ converge uniformément sur tout segment de $I$ vers $g_k$, la limite $f$ est de classe $\mcal{C}^k$ sur $I$ et $$ \D^r f=g_r\text{ \ie{} } \qqs t\in I,\ \ra{d^r}{dt^r}\Bigl(\lim_n f_n(t)\Bigr) =\lim_n\Bigl(\ra{d^r}{dt^r}\bigl( f_n(t)\bigr)\Bigr) $$ \end{Th} \begin{proof} La démonstration utilise une récurrence sur $k$; le cas $k=1$ est le théorème précédent. Si la suite $(f_n)_n$ vérifie les hypothèses du théorème au rang $k+1$, la suite $(f'_n)_n$ vérifie les hypothèses au rang $k$ et, grâce à l'hypothèse de récurrence, $g_1$, la limite de $(f'_n)_n$ est de classe $\mcal{C}^k$. La remarque précédente, montre que la convergence de $(f'_n)_n$ vers $g_1$ est uniforme sur tous les segments de $I$. Ainsi, nous pouvons appliquer le théorème de dérivation ($k=1$) : $f$ est $\mcal{C}^1$, $f'=g_1$; ce qui montre que $f$ est de classe $\mcal{C}^{k+1}$. \end{proof} %-------------------------------------------------- %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Dérivation terme à terme d'une série de fonctions} %--------------------------------------------------------------------- Toujours la même technique : utilisation de la suite $(S_n)_n$ des sommes partielles de la série : $S_n=\sum_{k=0}^n u_k$; on sait dériver terme à terme une combinaison d'un nombre fini de fonctions, et $$ S'=\sum_{k=0}^n u'_k\et \D^r S=\sum_{k=0}^n \D^r u_k $$ pourvu que les $u_k$ soient dérivables à l'ordre $r$. \begin{Th}[Dérivation terme à terme d'une série de fonctions]\alaligne Si $(u_n)_n$ est une suite de fonctions numériques de classe $\mcal{C}^1$ sur $I$, si la série $\sum u_n$ converge simplement sur $I$ et si la série des dérivées $\sum u'_n$ converge uniformément sur tout segment de $I$, la somme de la série $\sum u_n$ est de classe $\mcal{C}^1$ sur $I$ et $$ \D\Bigl(\sum_{n=0}^\infty u_n \Bigr)=\sum_{n=0}^\infty \D u_n \text{ \ie{} }\qqs t\in I,\ \ra d{dt}\Bigl(\sum_{n=0}^\infty u_n(t)\Bigr) =\sum_{n=0}^\infty u'_n(t) $$ \end{Th} \begin{proof} ${(S_n)}_n$ est une suite de fonctions de class $\mcal{C}^1$ sur $I$ qui converge simplement sur $I$ vers la somme $S$ de la série $\sum u_n$; la suite $(S'_n)_n$ converge uniformément sur tout segment de $I$ vers la somme de la série $\sum u'_n$ (qui est donc continue). Par application du théorème de dérivation de la limite d'une suite de fonctions, $S$ est de classe $\mcal{C}^1$ et $S'$ est la somme de la série $\sum u'_n$. En prime, la convergece de la série $\sum u_n$ est uniforme sur tous les segments de~$I$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Extension aux fonctions de classe $\mcal{C}^k$]\alaligne Si $(u_n)_n$ est une suite de fonctions de classe $\mcal{C}^k$ sur $I$, si, pour tout $r\in\Intf0{k-1}$, la série $\sum \D^r u_n$ converge simplement sur $I$ et si la série $\D^r u_n$ converge uniformément sur tout segment de $I$, la somme de la série $\sum u_n$ est de classe $\mcal{C}^k$ sur $I$ et $$ \qqs r\in\Intf1k,\ \D^r\Bigl(\sum_{n=0}^\infty u_n\Bigr)=\sum_{n=0}^\infty \D^r u_n $$ \end{Th} \begin{proof} Application à $(S_n)_n$ de l'extension aux fonctions de classe $\mcal{C}^k$ du théorème de la dérivation de la limite d'une suite de fonctions. \end{proof} %-------------------------------------------------- %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Dérivée de la fonction exponentielle} %--------------------------------------------------------------------- Rappelons que la fonction exponentielle est la somme de la série $\sum z^n/n!$, série absolument convergente pour tout $z$ de $\C$. \begin{Th}[Dérivée de l'exponentielle]\alaligne L'application $e_z : t\mapsto\exp tz$, où $z$ est un nombre complexe, est de classe $\mcal{C}^\infty$ sur $\R$ et $$ \D e_z=z\,e_z\text{ \ie{} }\qqs t\in\R,\ \ra d{dt}\Bigl(\exp tz\Bigr)=z\exp tz $$ \end{Th} \begin{proof} Posons $u_n(t)=z^n t^n/n!$; les fonctions $u_n$ sont de classe $\mcal{C}^1$ (et même $\mcal{C}^\infty$ sur $\R$), la série $\sum u_n$ converge simplement sur $\R$ et, pour tout $a>0$ et tout $t\in\intf{-a}a$, \begin{equation} \abs{u'_n(t)}=\Bigl|\ra{z^n}{(n-1)!}t^{n-1}\Bigr| =\ra{\abs{z}^n}{(n-1)!}\abs{t}^{n-1} \leq\ra{\abs{z}^n}{(n-1)!}a^{n-1} \end{equation} ce qui montre la convergence normale donc uniforme sur $\intf{-a}a$ de la série $\sum u'_n$. La somme de la série $\sum u_n$ est de classe $\mcal{C}^1$ sur $\R$ et sa dérivée vérifie : \begin{equation} \qqs t\in\R,\ \ra d{dt}\Bigl(\exp tz \Bigr)=\sum_{n=0}^\infty u'_n(t) =\sum_{n>0}\ra{z^n}{(n-1)!}t^{n-1}=z\sum_{n>0}\ra{(zt)^{n-1}}{(n-1)!} =z\exp zt \end{equation} $e_z$ est une fonction de classe $\mcal{C}^1$ qui vérifie $\D e_z=z\,e_z$; par récurrence, $e_z$ est une fonction de classe $\mcal{C}^k$, et ceci pour tout $k$, donc de classe $\mcal{C}^\infty$. \end{proof} %-------------------------------------------------- %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \section{Intégrales dépendant de ses bornes} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Intégrale du type $x\mapsto\int_{t=a}^x\vc f(t)\,\dt$}\alaligne %--------------------------------------------------------------------- Rappelons que, si $\vc f$ est une fonction continue sur $I$, $\vc F : x\mapsto\int_{t=a}^x\vc f(t)\,\dt$ est la primitive de $\vc f$ nulle en $a$, ce qui montre que $\vc F$ est de classe $\mcal{C}^1$ sur $I$ et $$ \qqs x \in I,\ \vc F'(x)=\ra d{dx}\Bigl(\int_{t=a}^x\vc f(t)\,\dt\Bigr) =\vc f(x) $$ Si $\vc f$ est de classe $\mcal{C}^k$ sur $I$, $\vc F$ est de classe $\mcal{C}^{k+1}$ sur $I$, puisque $\vc F'=\vc f$ est de classe~$\mcal{C}^k$. Si $\vc f$ est continue par morceaux sur $I$, $\vc F$ est encore la primitive de $\vc f$ nulle en $a$; $\vc F$ est continue sur $I$ et de classe $\mcal{C}^1$ par morceaux sur $I$; la formule de dérivation est valable en tout point de continuité de $\vc f$. %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Intégrale du type $x\mapsto\int_{t=u(x)}^{v(x)}\vc f(t)\,\dt$}\alaligne %--------------------------------------------------------------------- Notons $\vc F$ une primitive de $\vc f$ sur $I$; nous pouvons écrire $$ \vc g(x)=\int_{t=u(x)}^{v(x)}\vc f(t)\,\dt =\vc F\bigl(v(x)\bigr)-\vc F\bigl(u(x)\bigr) $$ On obtient le résultat suivant : si $\vc f$ est une fonction continue sur $I$, si $u$ et $v$ sont deux fonctions réelles de classe $\mcal{C}^1$ sur $J$ à valeurs dans $I$, $\vc g$ est une fonction de classe $\mcal{C}^1$ sur $J$ dont la dérivée se calcule par \begin{multline} \ra d{dx}\Bigl(\int_{t=u(x)}^{v(x)}\vc f(t)\,\dt\Bigr) =\ra d{dx}\Bigl(\vc F\bigl(v(x)\bigr)-\vc F\bigl(u(x)\bigr)\Bigr) \\ =\vc F'\bigl(v(x)\bigr)v'(x)-\vc F'\bigl(u(x)\bigr)u'(x) =\vc f\bigl(v(x)\bigr)v'(x)-\vc f\bigl(u(x)\bigr)u'(x) \end{multline} formule à ne pas apprendre par c{\oe}ur, mais à retrouver dans chaque application. %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% \section{Intégrales dépendant d'un paramètre} %%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% Nous étudions dans cette section les fonctions définies par une intégrale dépendant d'un paramètre, par exemple les fonctions $J_n$, $n\in\N$ $$ J_n : x \mapsto \ra1\pi\int_{t=0}^\pi\cos(x\sin t-nt)\,\dt $$ que Bessel introduisit pour la première fois en 1817 lors de l'étude d'un problème de Kepler, et employa, sept ans plus tard, pour étudier les perturbations planétaires. Dans cette section, $A$ désigne un intervalle de $\R$; à toute fonction $f$ continue sur $A\times\intf ab$ et à valeurs réelles ou complexes, on associe la fonction $g$ définie sur~$A$ par la relation $$ g(x)=\int_{t=a}^b f(x,t)\,\dt $$ $g(x)$ a bien un sens puisque $t\mapsto f(x,t)$ est une fonction continue sur le segment $\intf ab$. %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Continuité sous le signe $\int$} %--------------------------------------------------------------------- \begin{Th}[Continuité des intégrales paramétrées sur un segment]\alaligne Si $f$ est une fonction numérique continue sur $A\times\intf ab$, la fonction $$ g : x\in A\mapsto \int_{t=a}^b f(x,t)\,\dt $$ est une fonction continue sur $A$. \end{Th} \begin{proof}(Hors programme) Soit $x_0$ un point intérieur à $A$; on peut alors trouver un segment $\intf cd$ contenu dans $A$ tel que $x_0\in\into cd$. La continuité de $f$ sur $A\times\intf ab$ implique l'uniforme continuité de $f$ sur la partie compacte $\intf cd\times\intf ab=\Delta$, soit \begin{multline*} \qqs\eps>0,\ \exists\eta>0,\ \qqs(x,t)\in\Delta,\ \qqs(x',t')\in\Delta, \\ \abs{x-x'}\leq\eta\et\abs{t-t'}\leq\eta\implique \abs[\big]{f(x,t)-f(x',t')}\leq\ra\eps{(b-a)} \end{multline*} En particulier, $$ \qqs t\in\intf ab,\ \qqs(x,x')\in{\intf cd}^2,\ \abs{x-x'}\leq\eta\implique\abs[\big]{f(x,t)-f(x',t)}\leq\ra\eps{(b-a)} $$ et, dans ces conditions, $$ \abs[\big]{g(x)-g(x')}=\abs[\Big]{\int_{t=a}^b \bigl(f(x,t)-f(x',t)\bigr)\,\dt} \leq \int_{t=a}^b\abs[\big]{f(x,t)-f(x',t)}\,\dt \leq \int_{t=a}^b \ra\eps{b-a}\,\dt=\eps $$ Ainsi, $\abs{x-x_0}\leq\eta$ implique $\abs[\big]{g(x)-g(x_0)} \leq \eps$; la fonction $g$ est donc continue au point $x_0$ et, puisque $x_0$ est un point quelconque de l'intérieur de $A$, $g$ est continue sur l'intérieur de $A$. La démonstration est analogue dans le cas où $x_0$ est une extrémité de $A$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Ex} Puisque $(x,t)\mapsto\cos(x\sin t-nt)$ est continue sur $\R\times\intf0{2\pi}$, les fonctions $J_n$ sont continues sur $\R$. \end{Ex} %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Dérivation sous le signe $\int$} %--------------------------------------------------------------------- \begin{Th}[Formule de Leibniz]\alaligne Lorsque $f$ est continue sur $A\times\intf ab$ et admet une dérivée partielle $\del fx$ continue sur $A\times\intf ab$, $g$ est de classe $\mcal{C}^1$ sur $A$ et \Reponse{$\dsp g'(x)=\dd{}x\Bigl(\int_{t=a}^b f(x,t)\,\dt\Bigr) =\int_{t=a}^b\del fx(x,t)\,\dt $} \end{Th} \begin{proof} (Hors programme). Soient $x_0$ un point intérieur à $I$ et $\intf cd$ un segment de $I$ tel que $x_0\in\into cd$. La continuité de la fonction $\partial f/\partial x$ sur $A\times\intf ab$ implique son uniforme continuité sur la partie compacte compacte $\Delta=\intf cd\times\intf ab$, ce qui donne \begin{multline*} \qqs\eps>0,\ \exists\eta>0,\ \qqs(x,t)\in\Delta,\ \qqs(x',t')\in\Delta, \\ \abs{x-x'}\leq\eta\et\abs{t-t'}\leq\eta\implique \abs[\Big]{\del fx (x,t)-\del fx (x',t')}\leq\ra\eps{(b-a)} \end{multline*} Soit $\psi : u\mapsto f(x_0+u,t)-u \del fx(x_0,t)$; la fonction $\psi$ est une fonction de classe $\mathcal{C}^1$ sur un voisinage de $u=0$ et $\psi'(u) =\del fx(x_0+u,t)-\del fx(x_0,t)$; pour $\abs{u}\leq\eta$ tel que $x_0+u\in\intf cd$, $\abs{\psi'(u)}\leq\eps/(b-a)$. Appliquons l'inégalité des accroissements finis : pour $\abs{h}\leq\eta$ tel que $x_0+h\in\intf cd$, on a $$ \abs[\big]{\psi(h)-\psi(0)}= \abs[\Big]{f(x_0+h,t)-f(x_0,t)-h\del fx(x_0,t)} \leq \abs{h}\ra\eps{b-a} $$ Ainsi, en formant le taux d'accroissement de $g$ en $x_0$, il vient \begin{align*} \abs[\Big]{\ra{g(x_0+h)-g(x_0)}{h}-\int_{t=a}^b \del fx(x_0,t)\,\dt} &= \abs{h}^{-1}\abs[\Big]{\int_{t=a}^b \Bigl[f(x_0+h,t)-f(x_0,t)-h\del fx(x_0,t)\Bigr]\,\dt} \\ &\leq \abs{h}^{-1}\int_{t=a}^b \abs[\Big]{f(x_0+h,t)-f(x_0,t)-h\del fx(x_0,t)}\,\dt \\ &\leq \abs{h}^{-1}\int_{t=a}^b \abs{h}\ra\eps{b-a}\,\dt=\eps \end{align*} ce qui montre que $$ \lim_{h\to0}\ra{g(x_0+h)-g(x_0)}{h}-\int_{t=a}^b \del fx(x_0,t)\,\dt=0 $$ La fonction $g$ est donc dérivable au point $x_0$ et $$ g'(x_0)=\int_{t=a}^b \del fx(x_0,t)\,\dt $$ Puisque $x_0$ est un point quelconque de l'intérieur de $A$, la fonction $g$ est donc dérivable sur l'intérieur de $A$. La démonstration est analogue dans le cas où $x_0$ est une extrémité de $A$. Le théorème de continuité des intégrales paramétrées sur un segment, montre la continuité de $g'$ sur l'intervalle $A$; la fonction $g$ est donc une fonction de classe $\mathcal{C}^1$ sur l'intervalle $A$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Th}[Extension aux fonctions de classe $\mcal{C}^k$]\alaligne Lorsque $f$ est continue sur $A\times\intf ab$ et admet des dérivées partielles $\Del rfx$ continue sur $A\times\intf ab$ jusqu'à l'ordre $k$, $g$ est de classe $\mcal{C}^k$ sur $A$ et $$ \qqs r\in\Intf1k,\ g^{(r)}(x)=\ra {d^r}{dx^r}\Bigl(\int_{t=a}^b f(x,t)\,\dt)\Bigr) =\int_{t=a}^b\Del rfx(x,t)\,\dt $$ \end{Th} \begin{proof} Par récurrence sur $k$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Exs} Puisque $(x,t)\mapsto\del{}x\bigl(\cos(x\sin t)\bigr)=\cos(x\sin t+\ra\pi2)\sin t$ est continue sur $\R\times\intf0\pi$, $J_0$ est de classe $\mcal{C}^1$ sur $\R$ et $$ J'_0(x)=\ra1\pi\int_{t=0}^\pi \cos(x\sin t+\ra\pi2)\sin t\,\dt $$ De même, pour tout entier $k$, $(x,t)\mapsto\Del k{}x\bigl(\cos(x\sin t)\bigr) =\cos(x\sin t+k\ra\pi2)(\sin t)^k$ est continue sur $\R\times\intf0\pi$, $J_0$ est de classe $\mcal{C}^k$ sur $\R$ et $$ \D^kJ_0(x)=\ra1\pi\int_{t=0}^\pi \cos(x\sin t+k\ra\pi2)\sin t\,\dt $$ $J_0$ est donc une fonction de classe $\mcal{C}^\infty$ sur $\R$. De même, les fonctions $J_n$ sont de classe $\mathcal{C}^\infty$ sur $\R$. \begin{Th}[Division des fonctions de classe $\mathcal{C}^\infty$]\alaligne Soit $f$ une fonction de classe $\mathcal{C}^\infty$ sur $\R$; alors la fonction $$ g : x\mapsto \begin{cases} \dps \ra{f(x)-f(0)}{x} & \text{si $x\neq0$} \\ f'(0) & \text{si $x=0$} \end{cases} $$ est une fonction de classe $\mathcal{C}^\infty$ sur $\R$. \end{Th} \begin{proof} En utilisant le changement de variable $t=x\,u,\ \dt=x\,\dt[u]$, on obtient, pour $x\neq0$, $$ \ra{f(x)-f(0)}{x}=\ra1x\int_{t=0}^x f'(t)\,\dt=\int_{u=0}^1 f'(xu)\,\dt[u]=g(x) $$ Cette formule est encore valable pour $x=0$. Or, $(x,u)\mapsto f'(x\,u)$ est une fonction de classe $\mathcal{C}^\infty$ sur $\R\times\intf01$ et $\ra{\partial^k}{\partial x^k}\bigl(f'(x\,u)\bigr)=u^k f^{(k+1)}(x\,u)$; ainsi $g$ est une fonction de classe $\mathcal{C}^\infty$ sur $\R$ et $$ \qqs k\in\N,\ g^{(k)}(0)=\int_{u=0}^1 u^k f^{(k+1)}(0)\,\dt[u]= \ra{f^{(k+1)}(0)}{k+1} $$ \end{proof} %---------------------------------------------------------------------- \end{Exs} %--------------------------------------------------------------------- \subsection{Intégration sous le signe $\int$} %--------------------------------------------------------------------- \begin{Th}[Formule de Fubini]\alaligne Lorsque $f$ est continue sur $A\times\intf ab$, pout tout segment $\intf cd$ inclus dans $A$, on a \Reponse{$\dsp \int_{x=c}^d\Bigl[\int_{t=a}^b f(x,t)\,\dt\Bigr]\,\dt[x]= \int_{t=a}^b\Bigl[\int_{x=c}^d f(x,t)\,\dt[x])\Bigr]\,\dt $} \end{Th} \begin{proof}(Hors programme). Posons $g(y)=\int_{x=c}^y \bigl[\int_{t=a}^b f(x,t)\,\dt\bigr]\,\dt[x]$ et $h(y)=\int_{t=a}^b \bigl[\int_{x=c}^y f(x,t)\,\dt[x])\bigr]\,\dt$. Puisque $x\mapsto \int_{t=a}^b f(x,t)\,\dt$ est continue sur $A$, la fonction $g$ est une fonction de classe $\mathcal{C}^1$ sur~$A$ et $g'(y)=\int_{t=a}^y f(x,t)\,\dt$. Puisque $(x,t)\mapsto\int_{x=c}^d f(x,t)\,\dt[x]$ et $(y,t)\mapsto\partial/\partial y\bigl(\int_{x=c}^y f(x,t)\,\dt[x]\bigr)=f(y,t)$ sont continues sur $A\times\intf ab$, la fonction $h$ est une fonction de classe $\mathcal{C}^1$ sur $A$ et $h'(y)=\int_{t=a}^b f(y,t)\,\dt$. Les fonctions $g$ et $h$ ont la même dérivée sur l'\emph{intervalle} $A$ et la même valeur $0$ au point $y=c$; ces fonctions sont donc identiques et $g(d)=h(d)$. \end{proof} %-------------------------------------------------- \begin{Ex}Calcul de $\int_{t=0}^\pi\bigl(\ln(b-\cos t)-\ln(a-\cos t)\bigr)\,\dt$ pour $1<a<b$. On remarque que $\ln(b-\cos t)-\ln(a-\cos t)= \int_{x=a}^b(x-\cos t)^{-1}\,\dt[x]$ et $$ \int_{t=0}^\pi \ln\ra{b-\cos t}{a-\cos t}\,\dt= \int_{t=0}^\pi\Bigl[\int_{x=a}^b \ra1{x-\cos t}\,\dt[x]\Bigr]\,\dt= \int_{x=a}^b\Bigl[\int_{t=0}^\pi \ra1{x-\cos t}\,\dt\Bigr]\,\dt[x] $$ Le changement de variable $u=\tan(t/2)$, $t=2\arctan u$, $\dt=2(1+u^2)^{-1}\,\dt[u]$ permet le calcul de l'intégrale : \begin{align*} \int_{t=0}^\pi \ra{\dt}{x-\cos t} &= \int_{u=0}^{+\infty} \ra1{x-\ra{1-u^2}{1+u^2}}\ra2{1+u^2}\,\dt[u] =2\int_{u=0}^{+\infty} \ra{\dt[u]}{(x+1)u^2+(x-1)} \\ &= \ra2{x+1}\int_{u=0}^{+\infty} \ra{\dt[u]}{u^2+\ra{x-1}{x+1}} =\ra2{x+1}\;\sqrt{\ra{x+1}{x-1}} \arctan u\sqrt{\ra{x+1}{x-1}}\entre[\Big]{u=0}{u\to+\infty} =\ra2{\sqrt{x^2-1}}\ra\pi2 \end{align*} Les calculs s'achèvent par $$ \int_{t=0}^\pi \ln\ra{b-\cos t}{a-\cos t}\,\dt= \int_{x=a}^b \ra\pi{\sqrt{x^2-1}}\,\dt[x]= \pi\ln\bigl(x+\sqrt{x^2-1}\bigr)\entre[\Big]{x=a}{x=b}= \pi\ln\ra{b+\sqrt{b^2-1}}{a+\sqrt{a^2-1}} $$ \end{Ex}